La Planète des singes par Francis Janvier
La Planète des Singes est bien plus qu'un classique, c'est un monument, un chef-d'oeuvre. Premièrement, parce que c'est un film intelligent au message social et politique à peine voilé, une merveilleuse allégorie de notre société à travers un monde où les rôles auraient été inversés, les humains étant maintenant traités comme des animaux. Si le message semble à première vue facile, il est néanmoins extrêmement percutant, car ce n'est que lorsqu'un homme est finalement traité comme un animal (qu'il soit chassé, étudié, soumis à des expériences scientifiques ou transformé en animal de compagnie), que l'on se rend compte de l'absurdité des traitements infligés aux animaux. Et l'on ne parle pas ici seulement d'animaux maltraités, on parle d'animaux qui sont simplement traités différemment des hommes : enfermés dans des cages, accouplés contre leur volonté, privé de libre-arbitre et de droits, des choses qu'il semble naturel pour chacun de nous d'infliger aux animaux sous prétexte qu'ils ne sont pas intelligents et ne méritent pas d'être traités comme des égaux. Le film propose donc une réflexion extrêmement pertinente sur la condition animale, tout en faisant par ailleurs une autre allégorie : celle du pouvoir religieux. Critique bien peu subtile du clergé catholique qui s'est soulevé contre les Coppernic, Galilée et Darwin de ce monde, car leurs découvertes menaçaient la toute-puissance de l'Église (fondée sur l'ignorance du peuple), mettant ainsi en lumière l'absurdité du créationnisme qui nie toute évidence scientifique. Comme si ce n'était pas assez, La Planète des Singes propose aussi, en dernier lieu, une réflexion sur l'autodestruction par la guerre, conduisant dans ce cas-ci à la prise de pouvoir par les autres grands singes, et à la soumission de l'homme destructeur ; dans un contexte de Guerre Froide à la sortie du film, cette partie de l'intrigue est plus que pertinente. Deuxièmement (enfin), parce que c'est foutrement beau. Les décors sont grandioses, les costumes superbes, mais ce sont surtout les maquillages qui sont proprement saisissants, inégalés depuis. Même dans son costume de guenon, Kim Hunter est magnifique, son regard étincelant suffit à captiver ; Charlton Heston est quant à lui toujours aussi génial. En plus de tout ça, La Planète des Singes n'oublie pas d'être divertissant et surprenant, grâce à des scènes d'action minutieuses, une tension palpable, un script brillant et l'un des meilleurs plot twists du cinéma.