Une véritable tragédie sociale où Arthur Penn détecte avec acuité les aspirations de toutes les couches du tissu social et le malaise d'une société dans une petite ville du Texas. A travers une chasse à l'homme, le réalisateur observe la montée de la violence chez des citoyens à priori sans histoires, et qui par désoeuvrement n'ont plus que ce moyen expiatoire pour s'imposer dans le rang social. Cette montée de la violence arrache les habitants à leur torpeur et à leur conformisme, déchaînant les sentiments refoulés, le fanatisme, l'exclusion et les passions.
Pour tenter d'endiguer la folie de ce microcosme d'une Amérique moderne provinciale, principalement dans une petite ville de bouseux, le sheriff incarné par un Marlon Brando des grands jours, reste impuissant. Le reste du casting est exceptionnel jusque dans les petits rôles ; Robert Redford n'avait pas encore gagné ses galons de vedette, mais il incarne un personnage contre lequel tout le monde se ligue. Arthur Penn signe ici un de ses grands films, en dénonçant non seulement le racisme latent et le goût pour une violence collective et aveugle, mais aussi le pouvoir corrupteur de l'argent, et la fragilité de l'empire d'un potentat local. C'est donc une description au vitriol de l'Amérique profonde souvent délaissée par le pouvoir de Washington, un film d'une grande puissance au réalisme brutal.