Igor est apprenti mécanicien. Le métier l'intéresse, mais il est poussé par Roger à d'autres ambitions, comme loger et faire travailler des immigrants au noir. Roger, c'est son complice dans une existence où la survie est réduite à une condition animale. Mais comme toujours chez les Dardenne, c'est dans un environnement inhumain que l'humanité se révèle. Car Roger, c'est aussi un copain, et surtout c'est un père – on le découvre tardivement, il l'est rarement, maladroitement, et plus du tout quand la subsistance doit se substituer à un semblant d'éducation… mais c'en est un.
Ce que La Promesse a de plus qu'un récit sur l'adaptation sociale, c'est l'émergence de la morale chez un adolescent, et comment elle va s'agréger à partir de petits bouts d'expérience dans une vie qui y est hostile, jusqu'à définir quelle voie le jeune homme prendra. Igor comprendra qu'il est un mécanicien dans l'âme : avide de réparer tout ce qui lui passe sous la main, il ne travaillera peut-être jamais sur une voiture, mais c'est sa propre vie qu'il finira par faire marcher. Igor devient adulte en faisant la paix avec son père, ne serait-ce qu'en esprit, et c'est en reconnaissant en lui l'homme qui lui a permis de s'affirmer qu'il rend son père humain aussi. Le film a un côté satisfaisant (pas comme le plus terne Rosetta), car c'est l'histoire d'un miracle.