Les films portés par un projet esthétique se limitant à flatter nos bas instincts ont le vent en poupe, ce depuis belle lurette.
Reflet d'une époque qui voit triompher l'image et la vitesse sur le texte et la réflexion, ils sont certains, quel que soit leur niveau de médiocrité, de trouver un public.
Les ingrédients du film d'action ont beau ne pas être nombreux, les réalisateurs, en optant pour la surenchère, parviennent en effet à satisfaire l'insatiable néo-humain : la quantité supplée l'absence de qualité ; en outre, aux poursuites et aux bastons hystériques s'est désormais agrégé le gore (pendant longtemps apanage du film d'épouvante).
Cinéma a minima
La Protégée s'inscrit dans cette f(r)ange-là.
Le zombie des salles obscures aura donc sa dose d'explosions --- de buildings, de voitures, de têtes... et même de fruits ---, d'égorgements, de fusillades, de scènes hachées menu (avec en prime plusieurs ellipses prétendument fines), etc.
Pour faire bonne figure, lui sera aussi servi de l'humour décalé,
un tueur qui vient de décapiter la mère d'Anna, devant ses yeux, nettoie son arme en chantonnant Sea of Love : « mega-fun », non ?!
des face-à-face glamour, des cascades stylisées, des moments censément émouvants, etc., le tout en un gloubiboulga tenant à la fois de la tarantinade, du ridicule john-wooesque et de Nikita (Maggie Q oblige !)...
Mieux, Martin Campbell, intégralement vénal, pactise avec les lubies sociopolitiques de l’époque et fait revenir l'infâme recette à la mode au fond d'un wok(e) bien actuel :
> héroïne métis (américano-vietnamienne, à l’écran comme à la ville)
> protecteur noir dur à cuire (Samuel L. Jackson, cabot à souhait)
> gentille collègue de travail indienne
> mâles blancs à abattre
Ç'a beau être visuellement parfois élégant, ça reste vulgaire, bête, indigeste.
Une purée d'autant plus difficile à ingurgiter que je venais de visionner un film qui, lui, s'adresse au cœur et non pas au bulbe reptilien.
Plus navrant encore : beaucoup de ceux qui critiqueront La Protégée le feront car il a des airs de déjà-vu et ne trouve pas ses propres marques dans l'outrance et l'esbroufe. C'est parce qu'il ne sert pas suffisamment la goinfrerie qu'il sera déprécié !
Misère de misère...