La soif du pouvoir.
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le 9 mai 2020
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J'aime bien le cinéma "de papa" de Pierre Granier-Deferre, en particulier ses films des années 70, décennie au cours de laquelle le réalisateur a énormément tourné, enchaînant les classiques tels que "Le chat", "La veuve Couderc", "Le train", "Adieu poulet", suivis d'"Une étrange affaire" et "L'étoile du Nord" au tout début des eighties.
Autant dire tout un pan du cinéma français populaire, à la fois grand public et ambitieux.
Moins subtil qu'un Claude Sautet, Granier-Deferre partage avec celui-ci la capacité à esquisser une peinture authentique de la société française.
Avec "La race des seigneurs", adaptation du roman "Creezy" de Félicien Marceau (prix Goncourt 1969), Granier-Deferre signe une chronique du microcosme politique de l'après mai 68, cinq ans après les évènements.
Hélas, le réalisateur choisit de centrer son récit sur la relation passionnelle qui unit son héros, ambitieux politicien sur le point d'accéder au pouvoir, avec une jeune mannequin très éloignée de cet univers.
Le tableau de la situation politique apparaît donc relégué au second plan, la priorité étant donnée aux atermoiements amoureux du couple central, assez caricaturaux et minés par le jeu limité de l'américaine Sydne Rome, plus souvent dénudée qu'émouvante.
Le héros campé par Alain Delon se trouve tiraillé entre la passion amoureuse (son épouse étant par ailleurs hospitalisée pour dépression) et les sacrifices qu'imposeront forcément les hautes responsabilités qu'il convoite.
On regrette d'autant plus ces partis pris discutables que la peinture politique apparaît crédible et pertinente : entre la conseillère de l'ombre omnipotente (parfaitement incarnée par Jeanne Moreau, avatar de Marie-France Garaud), l'ancien Président marié à une ex-danseuse nue (Louis Seigner) et le politicien partagé entre ses grandes idées progressistes et les compromis(sions) requis par la volonté de gouverner (Jean-Marc Bory), l'ensemble sonne plutôt juste et dégage une certaine authenticité.
A cet égard, "La race des seigneurs" demeure l'un des rares exemples réussis de politique-fiction au sein du paysage ciné français, surtout au moment de sa sortie en 1974.
A noter que pour ébaucher le personnage de Julien Dandieu, Granier-Deferre et son scénariste Pascal Jardin se sont inspirés du journaliste et homme politique Jean-Jacques Servan-Schreiber, qui vécut à la même période une situation très similaire, en tant que centriste tenté de s'allier à la droite au pouvoir (elle-même affaiblie par une victoire étriquée aux législatives de 1973).
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le 22 juin 2022
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