Déjà agréablement surpris par ce film lors de sa découverte en VHS il y a de cela quelques années, c'est avec grand plaisir que je l'ai redécouvert à travers sa précieuse réédition chez un éditeur bien connu des amateurs de raretés improbables.
Poétique, langoureux, féroce, mais aussi drôle, parfois bien malgré lui, La Rose écorchée fait la démonstration d'un savoir-faire étonnant pour un long-métrage à l'extrême limite de l'amateurisme (Anny Duperey était la seule personne payée sur le tournage, des amis ou connaissances se sont improvisés techniciens), mais porté par un réalisateur et un chef-opérateur talentueux, et des acteurs oscillant entre jeunes premières et vieux routards.
D'un scénario digne d'une BD Elvifrance, Claude Mulot tire en effet un film visuellement magnifique pour tout amateur de l'esthétique de la Hammer ou du cinéma gothique italien, réjouissant par l'implication sans faille (et parfois maladroite) des acteurs, et par des idées de mise en scène gonflées mais justifiées (la vue subjective, les plans parfois tarabiscotés, parfois bluffant de maîtrise dans la composition). Evidemment, la beauté peu voilée des interprètes féminines renforce l'intérêt que tout spectateur légèrement érotomane peut accorder au film. Certaines scènes absurdes ou à l'humour incertain (à commencer par toutes les scènes avec les nains) ajoutent au charme de l'ensemble et allègent son ton pompeux du désespoir romantique un peu désuet, qui sans cela aurait frôlé le risible.
Anachronique, inclassable, La Rose écorchée se déguste comme un plaisir solitaire ; un délice dont on connait les défauts, mais aux qualités si fines qu'on ne pourrait guère les partager en société.