La route est longue
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le 3 mars 2011
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7
Un homme et son fils traversent un monde désertique, affamé et gris, gris, gris, uniformément gris, après une catastrophe dont le film n’évoquera jamais les causes. La Route est un film post-apocalyptique, comme il est de coutume de le dire, mais cela ne fait que circonscrire son contexte, car il n’est en effet pas une œuvre qui questionne, du moins frontalement, ou même de biais d’ailleurs, les désastres dont peuvent se rendre responsables les hommes d’aujourd’hui.
Mais bon, on en a suffisamment d’exemples dans la littérature, le cinéma, les jeux vidéos, la BD, depuis des décennies : le post-apo, comme sous-genre de la SF, a comme son genre matriciel une ressource solide de thématiques à aborder, notamment celle de l’humanité et ses conditions, sa réorganisation dans un nouveau paradigme social, la réévaluation de ses valeurs, des interactions et relations sociales, la nécessité pour l’espèce de se perpétuer dans des conditions hostiles…
Observons La Route à travers ce biais. Toutes les pistes précédemment citées sont abordées à leur manière. On commence assez tôt à nous présenter différentes scènes tournant autour du suicide, que ce soit celui des autres, ou celui, désiré mais jamais assumé jusqu’au bout, des protagonistes. Au moyen d’un montage qui brouille les repères temporels du spectateur, on nous laisse penser au départ que peut-être le binôme se dirige inéluctablement vers la mort volontaire. Outre le fait qu’il s’agisse d’une fausse piste, la simple évocation de cette possibilité peut à la rigueur souligner le dés-espoir du père. Pourquoi vivre, pourquoi mourir, pourquoi suis-je né, où vais-je, bref, tout cela n’est pas clair et ne pèse pas que sur le moral du binôme – s’il y a bien une chose que réussit ce film, c’est à excessivement miner le moral du spectateur qui finit par n’attendre qu’une chose : que ces deux balles soient tirées au bon endroit une bonne fois pour toutes, qu’on en finisse.
Parce que bon, vivre pour se régaler autour de la dernière canette de Coca de la planète, ou pour aller voir la mer, ou, attends, pourquoi ils vont vers le Sud déjà ? Parce que la mère leur a dit de le faire ? Celle qui s’est barrée dans la forêt, une nuit, sans explication ? Parce que, ah oui, il fait chaud, là-bas. Ok, et après quand on est dans le Sud, du coup ? C’est quoi l’objectif ? Je m’égare, c’est parce que ça m’énerve les coquilles vides dans l’art, on perd du temps, les gars, et du temps, on n’en a pas beaucoup. Bref.
Le flingue. Le flingue et ses deux cartouches, qui symbolise également la nécessité / la complexité de se défendre dans un milieu hostile où, en l’occurrence, la plupart des gens que tu croises ont une velléité de te faire cuire au barbecue. Et là tu me vois habilement arriver sur les relations sociales.
Alors, au compteur nous avons :
On a fait le tour je crois (j’ai pas oublié la fin, t’inquiète). Alors on pourrait dire : ouiiii, mais c’est pour dire que plus rien n’est possiiiible, que le quotidien n’est plus qu’une succession de meurtres et de fuiiiites, où la relation humaine est condamnée à l’écheeeec, la surviiiie… D’accord, d’accord. Dans ce cas, la seule relation possible reste la famille, c’est ça ? La relation père-fils, les liens du sang ?
Mais qu’est-ce qu’on nous raconte de cette relation ? A part quelques très ponctuels moments de relâchement (la cascade, le Coca, la coupe de cheveux), le binôme s’acharne dans la décrépitude et la dépression. Les dialogues sont insipides, voire tournent en boucle, et même en tâchant de mettre de côté le fait que je viens de regarder Captain Fantastic et que j’ai donc en mémoire un Viggo Mortensen en père fort, profond et engagé, je ne vois rien de réellement marquant ou riche d’enseignements dans cette relation. Je sens une volonté de mettre en contraste la perte d’humanité du père et l’empathie naturelle du garçon né pourtant dans un monde sans foi ni loi ; mais en disant cela, j’ai tout dit de ce que le film nous livre à ce sujet.
SPOILER ALERT
Je reviens enfin sur la fin, qui m’intrigue à plusieurs endroits, après m’avoir fait grincer des dents et crier des quoiii, mais commeeeent, mais c’est tellement abuséééé, à l’apparition du générique. Qu’est-ce donc que cette famille (couple, deux enfants, chien) qui apparaît miraculeusement dès la mort du père du garçon ? Un symbole d’espoir maladroit type never give up, ciao papa, déso que tu sois mort, moi j’ai trouvé une nouvelle famille trop sympa en plus ils ont un chien une grande baraque et une piscine ?
Une ILLUSION d’espoir ? Parce que quand même, la première apparition de cette famille est à 44 min de film, quand le gamin aperçoit un autre gamin qui l’observe. Ca voudrait dire qu’ils les suivent depuis bien longtemps. Peut-être même qu’ils sont la cause de la disparition du black, que c’est leur chien qui aboie quand ils trouvent le bunker, alors ça veut dire que sûrement ils vont le bouffer, ce gamin, je veux dire regarde ses gosses, ils ont l’air heureux de trouver un nouveau copain ? Eh non, clairement, ils se disent, oh merde, il est tout maigre, ça fait dix jours qu’on le suit tout ça pour se partager un sac d’os… Ok, j’arrête.
Plus je décortique ce film, plus je me dis que ce que signifie tout ça, c’est qu’il n’y a pas d’espoir. En rien. Pour rien. Pas la peine d’essayer. Et c’est tellement vain comme morale, en plus d’être appuyé par une photographie TROP déprimante, limite monochrome, que ça m’agace, qu’est-ce que ça m’agace.
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Créée
le 21 sept. 2017
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