Mizoguchi filme ici un Japon plus moderne et plus féminin : il parle ici d'une maison close, des filles qui la font tourner, des différentes histoires qui les ont poussées à y entrer, et de leur position vis à vis d'une loi en discussion au parlement qui interdirait la prostitution.

Outre les portraits touchants, précis, réalistes - comme toujours chez Mizoguchi - l'approche cinématographique de ce film reste picturale, il joue avec les ombres et la lumière, avec les cadres des portes, faisant à chaque fois de ses décors, des personnages à part entière du film.

Les hommes, pourtant très présents dans ses précédents films, sont ici effacés et la femme est celle qui fait vivre, elle est le sexe fort, la mère nourricière, la femme sacrifiée, la femme résolue, ou libérée. Grâce à ses différents portraits, Mizoguchi parvient à parler de liberté féminine, de la condition de la femme dans son pays, de pauvreté, de désir, d'ambition... Il fait comprendre qu'il faut compter avec ces dames pour construire le Japon de demain, qu'elles choisissent de rester prostituées ou de changer de milieu. Mais il dénonce aussi le peu de choix qu'on laisse aux femmes qui auraient besoin d'argent, à son époque - une des femmes se rend compte qu'elle gagne trois fois plus en maison close qu'elle ne gagnerait ailleurs. Il parle de la honte qui s'abat sur elles, de la difficulté de leurs choix....

Tout ça pour conclure que Mizoguchi aime les femmes et le prouve, aime le Japon, et le prouve, aime le cinéma, qui le lui rend bien. Et moi, j'aime Mizoguchi.
EIA
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Besoin de rien, envie de ça (version films)

Créée

le 1 janv. 2014

Critique lue 695 fois

19 j'aime

5 commentaires

EIA

Écrit par

Critique lue 695 fois

19
5

D'autres avis sur La Rue de la honte

La Rue de la honte
Theloma
8

Est-ce ainsi que les femmes vivent ?

Kenji Mizoguchi réalise entre 1922 et 1956 près d’une centaine de films. La Rue de la honte est son ultime réalisation. En brossant le portrait de cinq prostituées dans le Tokyo d’après-guerre,...

le 21 mars 2020

30 j'aime

17

La Rue de la honte
Krokodebil
9

Splendeurs et misères des courtisanes

Ultime film de Mizoguchi, véritable maître de l'âge d'or japonais, qui toutefois appartenait à la génération d'un Naruse et d'un Ozu (qui moururent quelques années plus tard) plutôt qu'à celle d'un...

le 14 avr. 2016

26 j'aime

1

La Rue de la honte
EIA
8

Red lights

Mizoguchi filme ici un Japon plus moderne et plus féminin : il parle ici d'une maison close, des filles qui la font tourner, des différentes histoires qui les ont poussées à y entrer, et de leur...

Par

le 1 janv. 2014

19 j'aime

5

Du même critique

Noé
EIA
6

4,5,6 ? Flou mystique

Au sortir du cinéma, s'il est une chose évidente, c'est que Noé ne laisse pas indifférent. La salle, comble, se déverse sur le trottoir sous les rires moqueurs et les oh! admiratifs, on donne son...

Par

le 13 avr. 2014

80 j'aime

48

Nostalghia
EIA
10

PS : I love you

Tellement de choses à dire de ce film.. D'abord, la honte de n'avoir jamais vu un film de Tarkovski avant ça, celle même de ne jamais en avoir entendu parler avant de passer mon temps sur Sens...

Par

le 25 juil. 2013

65 j'aime

15

Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur
EIA
10

"Viens au pays des Schtroumpfs, ou tout est merveilleux..."

Aujourd'hui j'ai mis deux dix. Soit quelqu'un a réussi (très discrètement) à m'administrer des petites pilules qui font voir la vie en rose, soit je suis une sacrée veinarde. J'ai toujours cru en ma...

Par

le 2 août 2014

60 j'aime

11