La science des rêves laissera dubitatif plus d’une personne… Car une fois le générique de fin passé et l’effet de surprise s’estompant, il est difficile de se positionner sur ce film objet, incomparable tant sur la forme que sur le fond.
La détonante originalité qui s’en dégage, le place par réflexe sur les rangs des grandes œuvres incontournables, au même titre que le précédent film de Gondry, « Eternal sunshine of the soptless mind ». A contrario, cet univers artificiel et déjanté peut donner l’illusion d’un grand moment de cinéma vécu, mais vite remisé au rang d’œuvres factices, tel le « Subway » de Besson ou certains films de Greenaway.
L’avis qui se dégagera alors chez le spectateur reposera d’une part sur sa perception toute subjective selon son propre vécu et de ses aspirations cinématographiques et d’autre part sur le décryptage des codes multiples, visuels, subliminaux et sentimentaux qui parsèment le film et peuvent le rendre opaque.
Mais si l’esprit s’ouvre à cet univers, plus encore s’il en est proche, alors voir « La science des rêves » est un bonheur sans nom.
Cette incroyable fantaisie qui repose sur l’histoire basique d’un homme qui aime une femme est un indescriptible et onirique patchwork bricolé de touches poétiques, dramatiques et d’un humour graveleux mais bien à propos. C’est une introspection impudique de ce qui motive tout le talent de Michel Gondry sur la plan sentimental et de sa propre oeuvre. C’est la vision puérile, mais tellement attachante, d’un adulescent sur notre société qui manque cruellement de folie.
L’univers clipesque et clownesque de Stéphane, interprété par un Gael Garcia Bernal monumental, est habillé de papier, de carton, de bouts de ficelle, il est un véritable prisme des années 80, où l’esprit pouvait être encore libre et créatif. Tout nous y fait penser, de la galerie des artistes de variété au détour d’un rêve, aux maquettes de maisons à l’image du « nouveau monde » célèbre clip de Téléphone, en passant par l’animation des pays de l’Est très en vogue avant l’arrivée de la trop sophistiquée 3D…
Si l’on est sensible à tout cela, alors oui, « La science des rêves » est un immense film où l’émotion vous submerge (la relation Bernal/Gainsbourg est mythique) autant que les éclats de rire qui vous titillent à tous moments (irremplaçable Chabat qui en est en partie responsable). Un surréalisme revigorant et novateur qui fait de cette œuvre un obscur objet du plaisir.