Aymé, même trop, même mal...
Deux de mes péchés mignons en un seul film, que demande le peuple ? Ce n'est un secret pour personne, j'ai une affection démesurée pour l'homme au faciès chevalin et pour les films de cambrousse, allez savoir pourquoi, ça doit remonter à l'enfance, pis Fernandel me rappelle toujours un peu ma grand-mère et j'ai jamais su résister à une meule de foin entre deux coups de rouge sur une table en chêne, mon petit côté Giono, ou ma tendresse pour Marcel Aymé...
Ici, ça tombe bien, c'est du Marcel tout plein, c'est l'histoire d'un garnafier qui retrouve un jour sa femme pendue et qui lutinerait bien la petite jeunette du port d'à côté pour fêter ça mais le frangin contrebandier consanguin ne voit pas ça d'un bon oeil et ça fait des histoires qu'on règle plus facilement à coups de fusil que de canon, ce qui s'explique probablement par la médiocrité de l'alcool du coin, que voulez-vous, nous sommes chez les sudistes...
Alors forcément, cul-terreux et sudistes de surcroit, ça commence à faire beaucoup pour les estomacs fragiles, surtout avec une ridicule histoire d'honneur par-dessus et je suis à deux doigts de friser l'indigestion... Avec ça, Fernandel est affublé comme sur l'affiche de cheveux hirsutes incompréhensibles et n'a peut-être pas le rôle le plus adapté à ses talents, mais qu'importe, il apporte tout de même à l'histoire sa légèreté bienvenue et désamorce souvent les plus gros défauts du machin.
Et puis tout de même, devant la caméra élégante du débutant Verneuil, il y a le bon curé sermonnant, les ignobles commères au lavoir, le conseil municipal républicain, le parfait résumé d'Aix-en-provence, le copain petzouillard moustachu, le vieux garde-champêtre aviné, le joli bol de café fumant le matin avec les épaisses tranches de gros pain et tout le foin dont je pouvais rêver, je ne peux pas me plaindre...