Ce film est de partie pris visuel, silencieux, linéaire, jusqu'à un dénouement annoncé dès les premières images, à l'instant où le cinéaste amène la focale à l'intérieur de cette maison, perdue dans une immensité industrielle de cannes à sucre.
On est en Colombie, dans une vallée andine qui a dû être un paradis d'orangers, d'arbres à pluie et de cette terre mère, que les paysans placent au dessus de tout, et refusent de quitter, y compris lorsqu'elle n'est plus que fantôme et poussière.
Cesar Acevedo dans cette première création fait hommage à ses deux parents disparus dans cette vallée détruite par la surexploitation sucrière, qui répand son suc blanc dans les bouches gourmandes de la planète, et sa poussière d'albâtre mortifère au fond des poumons des exploités agricoles.
Ca pourrait être en noir en blanc, la couleur est en trop, le vert brun délavé des cannes accroit la nausée, les plans séquences renforcent un propos impitoyable, sans issue, avec les allers retours dans l'enfer opaque de la maison, où se terre cette famille, entredéchirée, entre la détermination de la vieille mère qui n'abandonnera ni sa terre ni l'agonie de sa chair, son fils et celle du grand père de sauver ce qui est encore à sauver.
Les forçats de la poussière sont vus de façon lentement extatique, filmés de près, le regard brulant, à la Andrei Roublev, tandis que plus intimement, la famille est analysée dans son déterminisme atone.
Le clan familial recomposé (le grand père, la jeune mère, son jeune fils) tentera de sortir la tête de ce bourbier mortifère, dignement, sans cris, heurts, aménité...
Et l'on reste sidéré...

Goguengris
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 8 févr. 2016

Critique lue 523 fois

5 j'aime

Goguengris

Écrit par

Critique lue 523 fois

5

D'autres avis sur La Terre et l'Ombre

La Terre et l'Ombre
Goguengris
7

Critique de La Terre et l'Ombre par Goguengris

Ce film est de partie pris visuel, silencieux, linéaire, jusqu'à un dénouement annoncé dès les premières images, à l'instant où le cinéaste amène la focale à l'intérieur de cette maison, perdue dans...

le 8 févr. 2016

5 j'aime

La Terre et l'Ombre
GGA
9

Amor se escribe con llanto

Un film poignant, tant du point de vue des relations familiales que de notre relation avec la terre. Pour son premier long métrage, ce jeune réalisateur s’inspire de son histoire personnelle et celle...

Par

le 11 févr. 2016

4 j'aime

La Terre et l'Ombre
LeBlogDuCinéma
7

Film poétique réalisé avec talent et singularité

LA TERRE ET L’OMBRE est un film poétique, comme son titre qui symbolise nos racines et nos démons… Dans ce premier long métrage prometteur, César Acevedo nous parle d’un homme (Alfonso) qui a...

le 11 janv. 2016

4 j'aime

Du même critique

Vietnam
Goguengris
8

Nés au Nord pour mourir au Sud

Série documentaire de Ken Burns et Lynn Novick, en 9 parties, résultat d’un travail de 11 ans, à voir in extenso et pour certaines parties, à revoir, tant du point de vue historique, que sociétal...

le 27 sept. 2017

13 j'aime

Stefan Zweig - Adieu l'Europe
Goguengris
7

Critique de Stefan Zweig - Adieu l'Europe par Goguengris

L'exil et sa dernière errance au Brésil de Stefan Sweig loin de cette Europe déchirée de 39/40, seront sobrement filmés par Maria Shrader. Invite à relire le témoignage de ce grand esprit du siècle...

le 11 août 2016

11 j'aime

L'Éclipse
Goguengris
8

Critique de L'Éclipse par Goguengris

Rome ville déserte, aux larges avenues, aux ensembles rectilignes, subjuguant un cinéaste visionnaire. Plusieurs plans appuyés sur un entassement de briques. Les dernières images sur une façade...

le 12 juin 2016

8 j'aime

3