Archéologie du polar

Un peu comme "M le maudit", sorti deux ans plus tôt, "La tête d'un homme" se regarde surtout comme une curiosité pour l'amateur de polar, les deux films étant trop datés de mon point de vue pour captiver véritablement sur le fond, en dehors de la mise en scène respective de Lang et Duvivier.

Il faut dire que ce dernier se tire quand même une sacrée balle dans le pied, en mettant à jour les tenants et aboutissants du crime au bout d'à peine 13 minutes : autant dire que Duvivier rame ensuite sévèrement pour nous intéresser complètement à son histoire.
Il y parvient néanmoins pendant un certain temps, grâce notamment à la présence charismatique de l'étrange Valéry Inkijinoff, et à l'atmosphère oppressante née de sa mise en scène inspirée, encore très influencée par le cinéma muet.

Mais en dépit de tous les efforts et innovations formelles de Duvivier, il faut bien admettre que la dernière demi-heure s'avère interminable, malgré l'humanisme bonhomme d'Harry Baur dans le rôle de Maigret. D'ailleurs le commissaire imaginé par Simenon se révèle ici un incapable notoire, puisque ses investigations approximatives aboutissent à la mort des trois quarts des protagonistes concernés.

Il est toujours difficile d'évaluer un film aussi ancien, mais une indulgence excessive ne vaut guère mieux qu'une sévérité absurde : chacun se fera donc son opinion, mais "La tête d'un homme" mérite de toute façon le coup d'œil, en tant qu'opus séminal d'un genre - le polar - qui fera tant et tant d'émules dans les décennies suivantes...