On est d’abord poussé à croire qu’il s’agit de l’aventure d’un naufragé qui n’a pas d’autre choix que d’organiser sa vie et sa fuite de l’ile déserte où il s’est échoué, et d’une mystérieuse et improbable tortue rouge qui est là pour le tourmenter, le guider, le compléter, jusqu’à ce que le surprenant scenario bascule dans la magie merveilleuse. L’allégorie générale appelle déjà une relecture de ce conte fantastique, cette magnifique poésie de la vie, décrite par une cascade de métaphores insulaires catalysées par le prodigieux reptile : l’homme perdu dans un incompréhensible monde merveilleux et dangereux, sa regrettable bestialité, ses limites apprivoisées, la découverte de soi, les heurts et fusion avec une nature où l’adaptation s’avère la seule réponse, l’amour, la féminité, la famille, l’évolution, la destinée personnelle, l’apocalypse, la réinvention de sa vie, l’homme jardinier de son propre monde, le temps, la mort et le retour à la substance universelle.
Plus qu’une aventure dont seront aussi friands les enfants, ce dessin animé totalement muet, tout en sons, enjeux et situations, est une fable onirique et une authentique ode à la vie. Une étrange et géniale simplicité du dessin et des enjeux touche et captive de suite, provoquant empathie et personnalisation, jusque dans nos sensations tant physiques qu’émotionnelles.