Lors d'une représentation théâtrale à Edo, un acteur oyama, qui joue des rôles de femme, reconnait dans le public les trois hommes qui ont poussé ses parents à la ruine et à la mort. Il va servir de la fille de l'un d'entre eux pour se rapprocher du trio et ainsi assouvir sa vengeance qu'il fomente depuis si longtemps.
A l'origine, la Daiei donne la réalisation de ce projet à Kon Ichikawa car ses deux derniers films sous leur bannière n'ont pas marché, et que le réalisateur vit comme une punition de fait de refaire ce qui est un film des années 1930. Sauf qu'il va retourner la situation à son avantage avec un tournage en couleurs, et un Cinemascope de toute beauté, qui semble épouser le décor du théatre à la perfection.
La vengeance d'un acteur est peut-être le film le plus connu de Ichikawa, et ça n'est pas pour rien, tant c'est sublime de bout en bout, aussi bien sa beauté formelle, que le choix de ses acteurs. Aussi bien Kazuo Hasegawa (qui fêtait là son 300e film !), l'acteur oyama qui reste toujours dans son personnage féminisé jusqu'à sa posture et sa voix, que Ayako Wakao, qu'on voit surtout dans les films de Masumura.
C'est surtout une histoire sur une vengeance ourdie, qui ne prouve qu'elle n'est pas si bonne que ça car les dégâts collatéraux vont être dévastateurs, jusqu'à cette fin magnifique, qui semble comme un livre qu'on ferme sur une vie tragique. L'ironie est que cette commande va être paradoxalement un immense succès, et remettre Ichikawa dans les petits papiers de la Daiei. Signe de son importance, il signera l'année suivante le film des Jeux Olympiques de Tokyo. Mais en tout cas, la puissance de cette vengeance vaut le coup d'être vue.