La Vénus à la fourrure par Kahled
Avec son nouveau film, Roman Polanski reprend thématiques et procédé de mise en scène qui font la particularité habituelle de son cinéma : tension sexuelle, perversité, rapports de domination et ambiguïté narrative et scénaristique réunies avec un indéniable savoir-faire sous forme de huis-clos, approche cinématographique qu'il a à de nombreuses reprises abordée par le passé avec plus ou moins d'efficacité (de son premier film Le couteau dans l'eau (qui il faut bien l'admettre était assez mauvais dans son genre) à celui-ci en passant par des films tels que Cul-de-sac ou plus récemment Carnage (qui est son précédent film)). Par conséquent, monsieur Polanski ne nous offre rien de nouveau de ce côté. Certains pourraient dire que ça en devient lassant, mais c'est sans compter sur le talent du cinéaste. La qualité première de La Vénus à la fourrure est la qualité qui manque à des films tels que Le couteau dans l'eau à titre de comparaison : une tension qui monte crescendo entre les protagonistes de l'histoire et qui suscite de ce fait une attention particulière de la part des spectateurs, se demandant jusqu'où cela va aller (tension que j'ai trouvé pour ma part inexistante dans le premier film de Polanski et peu efficace dans un film comme Cul-de-sac). On pense assister tout d'abord à une banale audition mais rapidement le ton monte, la confrontation se fait jour, aboutissant à une véritable tentative de domination entre le metteur en scène et l'auditionnée (chacun essayant d'imposer ses idées), entre l'homme et la femme (qu'on peut aller jusqu'à percevoir comme étant les sujets d'une lutte des sexes chacun voulant essayer de prendre le dessus sur l'autre), entre le dirigeant et le dirigé. Ainsi de ces différents points de vue découlent plusieurs niveau de lectures qui amènent des questionnements sur l'art, le lien existant entre un artiste et son œuvre ou sur la place que "doivent" occuper un homme et une femme conformément aux mœurs sociétales. La seconde grande qualité du film est celle que j'ai évoqué plus haut en lui attribuant le terme de "thématique" : l’ambiguïté narrative et scénaristique de l’œuvre (qu'on retrouve dans un film comme Rosemary's Baby) qui fait volontairement perdre pied au spectateur : ainsi si le début de l'audition est relativement clair sur la place qu'occupe chacun des deux personnages, rapidement les rôles s'inversent, se confondent et on ne sait alors plus ce qui est de l'ordre du jeu, du fictif et ce qui est de l'ordre du "réel". Cette manière de bouleverser les places de chacun peut être perçue comme une manière pour le cinéaste de remettre en question les places occupées par homme et femme par rapport à l'image qui en est faite dans l'inconscient collectif, apportant de ce fait une touche contestataire au film vis-à-vis d'une société évolutive en apparence mais primaire encore dans son inconscient. Si, le film n'est pas dénué de qualités, bien triste est d'admettre qu'il n'en est pas pour autant dénué de défauts, le plus flagrant étant le jeu des acteurs peu convaincant à de nombreuses reprises. Seigner en fait parfois (souvent même) un peu trop dans son rôle de femme vulgaire brillant d'excellence quand il s'agit de jouer et Amalric n'est pas toujours convaincant : en d'autres termes certains passages sont assez ridicules du fait de la dimension un peu trop caricaturale du jeu d'acteur (mais paradoxalement et curieusement j'ai trouvé l'interprétation des deux plutôt bonne dans l'ensemble quand on se remet dans le contexte du film et de la construction des personnages : la caricature est peut être volontaire de la part de Polanski car servant le propos sur le clivage de la position respective de l'homme et de la femme et de plus de longs passages consistent pour les acteurs de jouer une pièce de théâtre (une mise en abyme assez intéressante d'ailleurs car servant à l'ambiguïté du film) et on ne joue pas au théâtre comme on joue au cinéma (ceci explique peut être cela mais comme ça m'a gêné je tenais à le souligner)). Un film qui demeure très intéressant dans son ensemble.