Bien sûr, il y a ces références culturelles omniprésentes, choisies avec soin, souvent pertinentes, mais aussi souvent formelles, un peu distantes. Bien sûr, il y a ces dialogues parfois lourdauds, un peu pâteux, tombant à plat et plein de lieux communs. Bien sûr, il y a cet échec à lier le film à une dimension sociale par trop banale, fonctionnelle, celle de l'amour interdit par des codes éloignés. Cette vision de deux mondes irréconciliables, que même la chose la plus forte du monde, l'amour, ne parvient pas à rassembler.

Mais peu importe. Ces ratés, ces à-côtés permettent de se focaliser sur l'essence, sur le cœur, le présent, l'immédiat.

Il y a, en premier lieu, ces corps, cette façon de les filmer avec tendresse, au plus près, jusqu'au moindre pore et dans tous leurs détails. Il y a cette proximité, cette chaleur qu'apporte le fameux bleu, le cyan, le sien. Il y a cette plénitude, cet absolu de l'actrice incarnation toute entière de son personnage. Cette nonchalance, forme d'expressionnisme Nouvelle Vague, esthétique de l'ennui qui tire les visages, les traits vers la terre, lourds, fatigués, las. Mais il y a surtout ce réveil discret qui prend toute son ampleur sur cette peau. Un sourire, un rire, un soupir, un regard, et tout s'anime, la vie prend forme et touche au sublime. Ces regards, moments de grâce ultimes, le temps s'arrête, suspendu, Cupidon agit. A-t-on jamais mieux filmé l'amour que dans cette fugacité, dans cet éphémère éternel ?

Il y a Adèle bien sûr, l'hypnotique, qui danse, autre moment de pure merveille, de liberté. Il y a ce sens interdit vers lequel se dirige Adèle... Interdiction de l'oubli peut-être espéré de cet amour, ce premier amour, celui qui reste, restera, pour toujours. Le droit de continuer, de recommencer ailleurs, mais pas d'oublier. Ne jamais l'oublier. Ou peut-être, dans une vision plus cruelle, Adèle ne peut-elle faire que demi-tour, revenir vers Emma. Destinée profondément tragique de leur histoire, Adèle ne peux ni atteindre l'objet de son désir, ni s'en détourner, elle est fatalement condamner à errer autour de cette chimère.

Il y a le cinéma. Il y l'amour. La vie. De toi, de moi, de Kechiche, du spectateur, de tout un chacun, dans une universalité parfaite. La vie d'Adèle.
Flavinours
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le 12 mars 2014

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Flavien M

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