Sophie est douée pour les mathématiques. Son instituteur le remarque et l’encourage à s’inscrire dans une prépa scientifique. La « voie royale » s’ouvre alors à cette fille d’éleveurs de cochons.
Bienvenue dans le monde de Sophie où les formules arithmétiques et les lois de la physique inscrites à la craie sur un tableau noir rappellent ce temps honni quand ce jargon nous assommait déjà. A l’opposé, l’étudiante s’extasie littéralement en modélisant la trajectoire d’une bille. Mais parmi l’élite qu’elle côtoie, son enthousiasme ne suffit guère. Scolaire, l’élève manque de « grâce » et se révèle médiocre. Sur le toit du lycée dominant le grand Lyon, Diane, sa première camarade, se sent apte à bouffer l’univers. A ses côtés, Sophie confesse ressentir le vertige. Les complexes de la campagnarde modeste et boursière freinent ses ambitions.
Mention « bien », voire « très bien », pour le parcours supérieur de Frédéric Mermoud qui rappelle la Première année de Thomas Lilti. Le schéma est quasi identique. Duo amical, de milieux et niveaux opposés, complices ou potentiels adversaires, révisions acharnées, panique des examens, avenir incertain, abandon. Le réalisateur helvétique décrit cet horizon très français avec application parvenant à animer une matière opaque, tout en évitant l’artifice d’une dramaturgie appuyée. Les bizutages demeurent acceptables, les porcs ici n’étant que des animaux ou quelques lourdauds rapidement remis en place par un féminisme léger. La lutte des classes s’immisce dans l’évocation des gilets jaunes ou lors d’un repas bourgeois condescendant. Exigeants, les professeurs ne sont pas méchants. S’il y a des échecs, ce ne sont pas des fatalités. Portée par ses acteurs brillants, cette question se pose : ces écoles supérieures ne constituent-elles pas un moule atrophiant les cerveaux éveillés pour qu’ils se fondent dans un système inique ou permettent-elles encore à cette jeunesse d’espérer changer la société à laquelle on les destine ?
(7/10)
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