Quand on s'apprête à regarder Le Bannissement, mieux vaut se blinder contre les longueurs. D'habitude, j'y suis très résilient, mais là... c'était trop. Pourtant la caméra est fluide... oui mais ses mouvements sont toujours les mêmes. Pourtant la musique est bonne... oui mais il n'y a qu'un seul son. Pourtant le scénario est fluide aussi, il avance comme sur une onde calme, s'immisçant avec succès dans l'intimité de la famille constituant ses protagonistes... oui, mais les maladresses se font clairement ressentir dans l'abordement du côté familial ; on sent bien que le but n'était pas d'entrer dans le détail, car suffisamment de temps était dévoué à la contemplation, du coup c'est raté, malgré le plaisir indéniable que les acteurs ont pris dans leurs rôles et la compétence des plus jeunes.
Le Bannissement est un très bon film technique, qui fait montre d'une maîtrise épatante du silence – là aussi, entre autres, par les plus jeunes interprètes –, jamais exagérément long, toujours posé et plein de sens. Mais l'histoire est longue, alors y intégrer ce procédé a pour effet de creuser un grand trou dans le visionnage : l'heure du milieu, qui ne sert à rien et qu'on aurait pu couper sans handicaper le film de quelconque manière.
Par contre, quand Zvyagintsyev fait du plan pour du plan, c'est magnifique. Il tue les perspectives avec une discrète maîtrise quand l'intrigue lui en laisse le temps, pour finir avec un travelling monstrueux en guise de conclusion qui m'a fortement impressionné, là encore, par sa fluidité, son minutage et ses couleurs pastels. Dans un autre registre, l'histoire présente de gros sauts dans le temps sans transitions qui demeurent tout à fait compréhensibles. Et enfin, elle cache bien son jeu puisqu'un drame de très bonne qualité se cache à sa fin, confrontant le spectateur à sa propre bêtise de s'être ennuyé, puisqu'on lui montre tous les éléments importants qu'il avait mis de côté et qui se sont avérés utiles.
Donc oui, c'est un excellent film. Mais beaucoup, beaucoup, beaucoup trop lent et long.
Quantième Art