La boue est plus qu'un symbole dans le film d'Ali Cherri : elle est la matière première sur laquelle travaillent les ouvriers d'une briqueterie près d'un barrage sur le Nil, et notamment pour l'un d'entre eux qui possède son propre secret. Il n'est pas question de le dévoiler ici, non par peur de divulgâcher, mais parce que le mystère qui entoure ses préoccupations (mystiques ?) ne sont jamais révélées. Ce long-métrage soudanais ne comporte presque aucun dialogue, moins en tous cas que de nouvelles diffusées par la radio sur la situation révolutionnaire dans le pays. De cette violence, le héros du Barrage en est très éloigné, obsédé qu'il est par une tâche qui semble beaucoup compter pour lui. Une grille de lecture ou, autrement dit, quelques indications du réalisateur, ne seraient pas de trop pour comprendre plus clairement de quoi il retourne. Mais malgré ce côté énigmatique, le film parvient à ne pas ennuyer grâce à une densité poétique et contemplative assez prégnante, qui n'est pas exempte de beauté, surtout dans les paysages proches du Nil ou plus loin dans le désert. Il n'y a donc pas de raison de bouder ce nouveau long-métrage soudanais (après Tu mourras à 20 ans), à condition d'être d'une humeur conciliante lors de sa projection, le film nous laissant finalement libre de notre interprétation, avec pour thème majeur, peut-être, le constat que les entreprises humaines ne sont que pure vanité face à la perfection de la nature.