Certains films font plus qu'être les témoins d'une époque, ils la transpirent littéralement, la suintent, l'exhalent à chaque scène et à chaque seconde. Au point d'en être de véritables ambassadeurs. Et d'impressionnantes sources de nostalgie pour quiconque a vécu en ces périodes ou est sensible à leur souvenir. Quelle que soit la qualité cinématographique de ces films, cette justesse de retranscription leur confère un capital sympathie touchant.
Remake d'un film de 1958 avec Steve McQueen, ce Blob de Chuck Russell (futur réal du splendiiiiide The Mask) rayonne de l'esthétique kitch et rétro des années 80. Que ce soit l'éclairage, la musique, les tronches, les costumes, les dialogues, le scénar', on est aspiré dans cette décennie aussi sec que le sont les personnages par la chose vorace qui donne son nom au film. Sorte de magma violacé multiforme et très corrosif, elle se déplace, se répand, s'infiltre partout et grandit non-stop en absorbant tout ce qui bouge. Cet indicible ennemi est absolument génial car on ne sait au final que peu de choses concrètes sur lui. Est-il vivant ? conscient ? intelligent ? Est-ce une créature affamée qui pourchasse ses victimes ? Un organisme quasi-minéral mû par le plus automatique des instincts ? Une substance chimique dont le besoin fondamental est de synthétiser toujours plus de nouveaux substrats (humains) ? Est-il tout ça à la fois ? Même l'explication de ses origines au cours du film ne donnera aucune réponse fiable quand à sa vraie nature. Sa réussite est bien entendu le tour-de-force majeur du film.
Par ailleurs, le scénario n'est ni très surprenant ni très subtil mais il réserve quelques moments d'anthologie (la cabine téléphonique, le cinéma, les égouts... les p'tits sadiques et autres amateurs de morts bien trasho-gores seront comblés !). Et déploie un excellent second degré avec une avalanche de clichés bien trop soutenue pour ne pas être voulue. A titre d'exemple de ces clichés : la métaphore biblique associant le Blob à l'Antéchrist, dont le point culminant sera l'assaut par la gélatine gloutonne devenue gigantesque de l'église du village où se sont réfugiés les habitants paniqués.
Résolument pro-80's tant dans la forme que dans le fond, un film emblématique qui possède l'aura de ces films qui se bonifient avec le temps pour quiconque sait les apprécier et se visionne avec un plaisir énorme.
A noter dans le casting, la prestation totalement bluffante et particulièrement mémorable de la gélatine rose dans le rôle principal, rôle qu'elle tenait déjà, bien plus jeune, dans l'original. Et dont la carrière au cinéma n'a connue depuis qu'un autre rôle notable : celui du moins corrosif mais tout aussi maléfique "Slime" dans S.O.S. Fantômes 2.