Attention, « Ma Rainey's Black Bottom » n’est pas un biopic sur Ma Rainey, chanteuse de blues des années 20. Il s’agit de l’adaptation d’une pièce de théâtre, qui se déroule pendant les quelques heures (fictionnelles) autour d’un enregistrement de l’artiste et de son groupe. On y verra notamment l’opposition entre Ma Rainey et d’une part ses producteurs blancs, et d’autre part un trompettiste trop ambitieux.
Le film a malheureusement tendance à s’éparpiller dans ses sujets. Il aborde à la fois la rivalité entre deux artistes, et le statut des Noirs dans les années 20. Deux thèmes intéressants, mais pas toujours habilement amenés. Typiquement, certains dialogues ou témoignages arrivent comme un cheveu sur la soupe et en huis-clos, trahissant les origines théâtrales du film. De plus, certains sous-intrigues sont trop peu développées (la petite amie de Ma, son neveu…).
Néanmoins, l’ensemble bénéficie d’une mise en scène qui tient la route, avec une photographie chaude renvoyant bien la pression et l’effort que subissent les personnages. De plus, les acteurs sont très convaincants. Surtout Viola Davis, qui incarne une chanteuse en apparence diva abjecte et capricieuse. Mais elle cache en réalité un tempérament fort, et la volonté de ne pas se laisser marcher dessus par des producteurs blancs qui ont du respect pour son art mais pas sa personne.
Et bien sûr Chadwick Boseman, étonnant et métamorphosé pour son dernier rôle avant son décès (la maladie l’avait visiblement amaigri ?). Il interprète ici le trompettiste trop sûr de lui, dont le sourire et l’ambition masquent un passé difficile. Une dernière prestation très honorable pour l’acteur, qui a sans doute fortement contribué à la médiatisation du film.