S’il est une chose que l’on retrouve aisément dans cette nouvelle production Netflix, c’est l’énergie et la mise en scène énervée de son réalisateur. Le monsieur es-baston, Gareth Evans, metteur en scène révélé par ce diptyque extraordinairement puissant et d’une violence inouïe qu’était la franchise The Raid.
Il explore cette fois-ci un univers totalement différent avec ce film dont l’intrigue se situe au début du siècle dernier sur une île sur laquelle une secte aux rites religieux pour le moins profanes pratique un culte étrange.
Faisant directement référence, de par son approche, à des films comme The Wicker Man ou The Village de Shyamalan, avec cette intrusion dans une communauté aux coutumes rétrogrades, Evans parvient à installer une ambiance étrange et à ménager un suspens allant crescendo, par l’utilisation de procédés de mise en scène habiles et mesurés. Une découverte progressive habitée par un sentiment de malaise permanent. On sait que quelque chose ne fonctionne pas normalement, et ce dès le premier plan montrant cette île où la faune et la flore semblent étrangement absentes.
Côté photographie, c’est impeccablement rendu et parfaitement maitrisé par ce réalisateur extrêmement habile pour rendre esthétisant des lieux communs, souvenons-nous de cet immeuble filmé comme un bunker hanté dans The Raid. Il parvient dès les premiers plans à installer un climat de malaise progressif jusqu’à la partie révélation. C’est alors que ça prend une toute autre tournure, que ça se prend un peu le pied dans le tapis, faute à un trop-plein de violence sadique et ultra-démonstrative du genre je vais appliquer au cinéma d’horreur gore et craspec ce que j’ai fait au cinéma de baston.
De longues scènes de torture crades et exagérément insistantes viennent grandement entacher la chose. Le gore en soi, lorsque son apport sert le propos et est utiliser comme artifice esthétisant, le cinéma de Lucio Fulci par exemple, n’est pas gênant, mais quand il s’agit d’insister sur certains aspects sadiques, dixit le cinéma de Pascal Laugier, ça vire souvent au ridiculement outrancier.
Intéressant de par sa progressive incursion dans un univers étrange, l’île lointaine déserte et mystérieuse étant l’un des lieux les plus cinématographiquement chatoyant, le film se perd donc dans ses excès de violence. On retrouve un peu dans ce film, clairement scindé en deux parties, la patte fougueuse de cet auteur qui a parfois tendance, en jeune chien fou qu’il est, à exagérer son propos dans des démonstrations sans limite.
L’autre petit hic réside dans le choix d’un casting pas toujours à la hauteur, avec notamment l’acteur Dan Stevens en interprète principal, qui en fait des caisses et dont la gestuelle n’est pas vraiment appropriée.
Assez partagé donc sur cette première incursion de ce réalisateur dans l’univers du film d’horreur, c’est très bien réalisé, ça rien à dire, Gareth Evans sait ménager un suspens et créer une ambiance, mais ça pêche parfois dans certaines outrances qui desservent sa mise en scène. Avec plus de retenu et un bon équilibre entre démonstration esthétisante et esbroufe, cette alchimie qui permet à l’une de ne pas sombrer dans l’autre, on tient là l’un des auteurs les plus intéressants du moment.