Je me souviens encore de la première fois où j'ai vu ce film sur Canal + vers 1998, j'en étais sorti déçu et consterné. Pourtant, en tant qu'amateur de films de cape & d'épée, je me faisais une joie de voir cette nouvelle adaptation. Que s'est-il passé ? Philippe De Broca était dans mon esprit l'homme de la situation, j'avais encore le souvenir d'un fabuleux Cartouche avec Belmondo, il ne devait pas me décevoir avec cette quatrième version du classique de Paul Féval. Eh ben non !
Cette histoire fait partie de mes jeunes années et de mon imaginaire enfantin, j'idéalisais Lagardère comme le héros de cape & d'épée par excellence, à égalité avec D'Artagnan. Aussi, les visionnages nombreux du film de Hunebelle avec Jean Marais m'avaient-ils ravi parce que j'y voyais l'incarnation du héros que j'avais imaginé. Ce sentiment a perduré avec le visionnage du feuilleton télé Lagardère avec Jean Piat en 1967 (découvert un peu plus tard). Ces versions m'avaient tellement conditionné à une qualité artistique et littéraire, à un académisme de bon aloi, que cette résurrection de De Broca totalement dénuée de panache, ne pouvait que m'atterrer profondément.
Même le TV-film de 2003 avec Bruno Wolkowitch, réussit à emporter mon adhésion car il adoptait une vision classique et propre du roman, sauf qu'il compressait un peu trop l'action et oubliait quelques épisodes en route.
J'en veux donc à De Broca d'avoir salopé mon beau rêve d'enfant avec sa mise en scène qui déroule l'action à toute vitesse et qui s'attarde sur des détails qui n'en valent pas la peine. Il revisite le genre cape & d'épée qui fit les beaux jours d'un certain cinéma français en oubliant l'émotion propre à ce genre d'intrigue, en manquant de souffle et en offrant une compilation de scènes sans éclat, desservies par des dialogues anachroniques et d'une certaine vulgarité par endroits. D'autre part, certains duels semblent peu crédibles, et je trouve que la petite Aurore de Nevers apprend bien vite l'escrime pour foutre la pâtée à des bretteurs plus chevronnés qu'elle.
Il y a encore le cas de Daniel Auteuil qui pourtant est un acteur que j'apprécie, il aurait dû normalement me plaire, mais je reste déçu par sa prestation, je ne le sens pas du tout à l'aise dans le rôle, il n'a pas l'étoffe de Jean Marais ou de Jean Piat, il manque de prestance, d'élégance, de classe et de panache, il est loin d'avoir l'allure noble dans ses mouvements, et même la fameuse réplique "Si tu ne viens pas à Lagardère, Lagardère ira à toi" sonne fade dans sa bouche.
Je n'accorde du crédit qu'aux autres acteurs : Noiret campe un noble Philippe d'Orléans, Luchini bien que souvent pénible dans d'autres films, se glisse avec talent dans la peau du méchant Gonzague, Marie Gillain est une fraîche Aurore, et Vincent Perez un bouillant duc de Nevers, sans oublier Didier Pain et Jean-François Stevenin à l'aise tous deux dans les rôles truculents de Cocardasse et Passepoil. Seul le rôle de Peyrolles semble moyennement distribué. Quant aux costumes, rien à dire, c'est soigné. En tout cas Jean Marais peut dormir sur ses 2 oreilles, personne pour l'instant ne peut lui ravir sa place ; je n'aime pas écrire des critiques négatives, mais là c'était trop, il fallait que ça sorte.