Dans son domaine à la campagne, entre les deux tours de l'élection présidentielle, le candidat donné battu prépare avec son staff de communicants le grand oral télévisuel face à son rival. Michel Dedieu passe pour un type sans charisme ni convictions, il est d'ailleurs le second choix de son parti après le retrait du candidat officiel.
C'est un vrai beau rôle pour Yvan Attal, convaincant de bout en bout dans un emploi éminemment "casse-gueule". C'est aussi un film parfaitement maîtrisé par Niels Arestrup, impeccable devant comme derrière la caméra. Dans l'intimité du candidat et de l'élection présidentielle, l'élection suprême, Arestrup évoque l'arrière-cuisine politique avec le réalisme que lui confèrent sur la forme une parfaite direction d'acteurs et, sur le fond, des arguments dépourvus de poujadisme ou d'esprit de caricature. Cette façon de démythification n'est pas en soi une révélation mais elle fait la démonstration rigoureuse que le possible président est un pion entre les mains d'énarques arrogants et, surtout, un pion manipulé par le grand capitalisme, incarné ici par un Niels Arestrup cynique et détestable comme il sait l'être, gourou supposé du CAC 40, faiseur et défaiseur occultes de président.
Au-delà du ballet de limousines, de costards-cravates et gardes du corps qui valident un décor habile et authentique, le film est habité par une atmosphère particulière et impressionnante, mélange de gravité et de suspens indéfini, sans doute liés à la personnalité ombrageuse et taciturne du candidat. Qui est Dedieu? Une coquille vide? On peut en douter lorsqu'à mi-film, initiant le second souffle du scénario, le candidat décide de rompre avec ses conseillers et avec la démagogie d'usage. Téméraire, Dedieu entend jouer la transparence et la sincérité. Sa mutation reste rigoureuse, sans candeur ni populisme.
Un film très prenant.