Accroche : 1931, Australie. Trois petites filles métisses aborigènes de huit à quatorze ans vivent heureuses dans la brousse avec leur famille quand elles sont brutalement capturées par un blanc et emmenées dans un camp d'emprisonnement, à 1300 kilomètres de là. Elles décident de s'échapper à pieds.
Sexymètre : RAS
Violencomètre : Le film contient beaucoup de violence psychologique, notamment sur des enfants, une scène où on bat une enfant ainsi qu'une scène suggérant un viol.
Bechdel test (test de sexisme : il doit y avoir deux personnages de femmes, nommées, parlant ensemble d'autre chose que d'un homme) : passé haut la main par les nombreux personnages principaux féminins.
*********** ATTENTION, RISQUE MINEUR DE CONTAMINATION PAR DES SPOILERS *****************
Mon avis :
Le film est l'adaptation du livre "Follow the Rabbit-Proof Fence" de Doris Pilkington Garimara, où l'autrice raconte l'histoire vraie de l'enfance de sa mère.
L'histoire met en scène l'oppression du peuple aborigène par les colons blancs, qui, après leur avoir fait la guerre pendant un siècle et avoir volé leur terre, ont tenté de les effacer génétiquement en kidnappant systématiquement leurs enfants et en les assimilant de force. Cette pratique, organisée par le gouvernement, a duré de 1910 à 1970. Les enfants, surnommés « Générations volées » (en anglais : Stolen Generations), étaient détenus dans des camps où leur culture, leur langue leur étaient interdites. Ils étaient ensuite placés comme serviteurs chez des blancs, où beaucoup furent maltraités voire violés, et mariés de force à des blancs, afin que le métissage des générations successives fasse disparaitre les gènes aborigènes. Ce n'est qu'en 2008 que le gouvernement australien a présenté des excuses sur le sujet et qu'en 2021 que des indemnisations ont commencé.
Le film est intelligemment écrit. Il montre plutôt que de papoter, témoigne de l'horreur de l'histoire, avec une mise en scène sobre, peu de dialogues, et ne tombe jamais dans le pathos. La réalisation n'est pas exceptionnelle et le passage du temps aurait pu être mieux montré. Les scènes sont horriblement réalistes et les jeunes actrices sont incroyables de crédibilité. On observe un système d'état visant à éteindre un peuple, à écraser une culture. Le film est dur, très dur. La scène du rapt est terrifiante dans sa rapidité, son inéluctabilité. Les blancs sont pour la plupart glaçants : fermiers qui participent au système, clergé qui, comme à son habitude, collabore de bon cœur à l'assimilation forcée. Kenneth Branagh surjoue un peu en grand organisateur du génocide mais rien de catastrophique.
Le film met un peu en scène les croyances aborigènes. Les magnifiques paysages ne parviennent pas à faire oublier l'enfer du voyage harassant des enfants dans le désert, l'expression figée dans la détermination de Molly, la fillette la plus âgée, qui se bat pour sa survie et celle de ses deux petites parentes, poursuivie par des blancs implacables.
En conclusion :
Un film bouleversant et important sur un épisode de l'histoire soigneusement étouffé par les colons. Un peu plus de contexte historique et idéologique aurait été utile mais vous le trouverez sans difficulté sur Wikipedia.