Le Comte n'est pas bon !
Il n'y a pas de bonne ou de mauvaise adaptation, il y en a des fidèles et d'autres qui s'éloignent plus ou moins du matériau d'origine. Et la qualité d'un film, issu d'une adaptation...
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le 1 juil. 2024
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Une bonne technique ne fait pas un bon film.
Maintenant qu'on a rappelé ce principe de base on peut passer à la suite et ça évitera aux gens de me dire "mais tu peux pas dire ça, et pis le film il est bo au moins", oui c'est vrai ce sont plutôt de belles images bien colorées qui mettent aussi bien en valeur les paysages parisiens que ceux du sud de la France, et les décors sont plutôt crédibles (quoique certains sont vraiment stéréotypés par rapport à l'idée que les gens s'en font). Mais derrière tout cette technique et ce panel d'acteurs de renom (Pierre Niney, Bastien Bouillon, Laurent Laffite, Anaïs Demoustier, ou encore l'étoile montante Anna Maria Vartolomei), ben ce n'est pas un bon film, et il n'est pas loin d'être catastrophique en terme d'esthétique, puisque heureusement quelques séquences viennent rendre le milieu du film plutôt acceptable.
Pour éclaircir un autre point, je ne vais également pas reprocher au film ses différents choix d'adaptation par rapport au livre de plus de 1000 pages écrit par Alexandre Dumas. Ce n'est jamais facile d'adapter une œuvre aussi conséquente et aussi large, et je trouve même que le film s'en sort "relativement" (même si on reviendra sur certains points) plutôt bien de ce côté là en allant à l'essentiel (parfois trop) et sans se perdre dans les digressions du bouquin qui étaient trop longues à mon goût lorsque je le lisais.
Maintenant qu'on a sauvé ce qu'il y avait à sauver du film, défonçons le en règle et sans préliminaires. Ce film n'est pas bon, le budget astronomique qui est bien visible à l'écran a conduit les deux réalisateurs du film que sont Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte a pondre un blockbuster lisse, éculé, bête, et de ne prendre aucun risque, qu'il soit artistique ou scénaristique. Jamais je n'ai été aussi gêné de ma vie que durant la première demie heure du film (à part peut être devant les fans films de Harry Potter sauf que ce sont des fans films et qu'ils n'ont pas coûté 43 millions d'euros), les dialogues et les scènes s'enchaînent trop vite, impossible de poser un cadre qui permet de s'immerger dans l'univers qu'on nous propose. J'ai rarement vu des dialogues aussi indigent (qui auraient pu être écrit par Philippe de Villiers sans déconner) et je me suis retrouvé plusieurs fois crispé de gêne devant ce que je subissais.
Bref, les scènes s'enchaînent dans une banalité assez notable comme lorsqu'un blockbuster américains coche les différentes charges qu'il a à cocher pour pouvoir être rentable auprès d'un public de débiles profonds et puis Dantès se fait arrêter. Premier gros problème niveau adaptation (j'ai dis que le film s'en sortait plutôt bien mais là il aurait clairement pu être meilleur), les motivations de Villefort et de Fernand pour faire enfermer Dantès sont ridicules et pas crédibles pour un sou, seules les motivations de Danglars le sont (et encore c'est vraiment montré de façon caricaturale). Dans le roman, Villefort est prêt à relâcher Dantès jusqu'à ce qu'il s'aperçoive que la lettre risque de le compromettre lui car elle le rattache à un membre de sa famille (en l'occurrence son père qui n'existe pas dans le film, on le remplace par une sœur et je n'ai pas souvenir qu'elle soit présent dans le bouquin), alors que les motivations qui poussent Villefort à finalement faire enfermer Dantès dans le film sont totalement absentes et n'arrivent qu'après ce qui est incohérent. Ensuite pour ce qui concerne Fernand, c'est lui qui va directement dénoncer Dantès dans toute sa jalousie morbide pour espérer avoir Mercedès en remettant la lettre à Villefort alors qu'elle lui tombe entre les mains, ce qui est beaucoup plus cruel et logique que dans le film où il se porte entièrement garant de Dantès avant de changer d'avis de façon complètement aléatoire (ce qui est irritant au possible).
Vient ensuite la partie du château d'If où Dantès y est enfermé pendant près de 13 ans et qui est bâclée comme pas possible. Encore une fois, le film est tellement lisse et gentil par rapport à la cruauté offerte par Dumas qui nous fait sentir le poids de l'isolement et de l'injustice qui pèse sur Dantès qui bascule de l'autre côté pour devenir le bras vengeur de Dieu sans aucune vergogne. On notera tout de même l'apparition appréciable de Pierfrancesco Favino pour jouer l'abbé Faria qui parle très bien français visiblement.
Pour le reste je ne vais pas trop m'étaler sur le reste du film qui remonte quand même un petit peu la pente (pas beaucoup non plus, ça reste quand même bâclé et très très dans l'explicatif bête et méchant), la scène du repas est finalement la scène que je préfère le plus car elle est la seule qui vient poser un cadre qui permet de nous sentir investi émotionnellement et est un tant soi peu jouissive. Je vais quand même m'attarder sur la fin et la partie qui intéresse le plus, à savoir la vengeance de Dantès/Monte Cristo à l'encontre de Danglars, Villefort, et Morcerf. Encore une fois, ça reste beaucoup trop gentil par rapport au livre et on ne ressent pas à un seul moment la satisfaction coupable de la chute brutale des trois antagonistes (dont on ressentirait presque de la pitié) qui ont bâtis leur personne et leur carrière sur la destruction d'un individu et qui subissent un colossal retour de bâton. Vous irez lire roman si vous voulez les détails, mais croyez moi c'est bien mieux qu'un duel à la con dont je me fous royalement entre Pierre Niney et Bastien Bouillon qui finit en eau de boudin et qui n'est pas cruel, ni spectaculaire pour un sou.
Pour le reste, les acteurs surnagent plutôt bien, que ce soit Niney, Laffite, Demoustier ou Bouillon. Par contre, même si j'aime beaucoup Vartolomei, l'accent des balkans qu'on ajoute à son personnage sonne incroyablement forcé et est insupportable, on avait vraiment pas besoin de ça pitié.
Enfin, j'aimerais terminer par la musique du film composée par Jérôme Rebotier qui est assez médiocre. Le mec se prend visiblement pour Hans Zimmer, mais est incapable de pondre un thème facile à retenir et monte systématique sur de grands sabots ridicules dès qu'une scène montre un peu d'enjeux. Pour 43 millions de budget, il y avait sûrement moyen de faire appel à quelqu'un de plus compétent pour composer autre chose qu'une musique débile type "blockbuster.mp3".
Sur ce, bonne journée !
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Créée
le 24 juil. 2024
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