Une série B lorgnant vers un Z totalement assumé avec des nonnes zombies, des satanistes du dimanche, une motarde ultra badass et une final girl hyper vénère armée d'une kalashnikov pour dézinguer tout ce qui bouge, on n'en voit pas tous les jours. De plus quand c'est réalisé par un jeune cinéaste à l'éducation chrétienne bien prononcée, avec maman qui invite ses copines bonnes sœurs à boire le thé et des études effectuées dans une institution catholique. Avec tout ça, on aurait pu penser que Mike Mendez aurait réalisé un biopic de Sœur Emmanuelle, mais c'est sans compter sur le fait que le jeune homme ait été cinématographiquement biberonné par Evil Dead II, Re-Animator et les deux Démons réalisés par Lamberto Bava. Ça change la donne.
En 1996, Mike Mendez coécrit et réalise son premier film intitulé Serial Killers. Un road movie sanglant qui stoppe sa route dans un pavillon bourgeois où la situation se retourne contre deux dégénérés évadés de prisons. L'habit ne fait pas le bourgeois.
Fort de cette expérience, la scénariste Chaton Itae pense à Mendez pour mettre en scène un truc un peu chelou qui lui est arrivé dans un couvent désaffecté où un prêtre complètement chtarbé pratiquait des avortements violemment barbares. Souhaitant se faire peur avec ses amies au sein du mystérieux couvent, Chaton aurait été témoin d'évènements inexplicables qui lui aurait fait prendre ses jambes à son cou. Immédiatement, Mendez imagine des nonnes diaboliques tandis que Chaton rédige un script en incluant les idées du jeune cinéaste. Grâce à un rôle spécialement écrit pour Adrienne Barbeau qui, touchée, accepte immédiatement la proposition, Itae et Mendez dénichent rapidement une équipe de production, un distributeur, ainsi que 500.000$ de budget (somme qui se verra doublée en post-prod' pour la promotion et le tirage des copies). Trois semaines de tournages intenses se verront nécessaires avec un manque d'argent évident en vue d'une production horrifique d'ores-et-déjà prévue à être distribuée en salles dans le monde entier. Du coup, Mendez et son équipe passent forcément en mode DIY, rusant perpétuellement pour les effets et les maquillages et usant de beaucoup d'imagination. Le tournage en extérieur s'effectue sans autorisation et l'équipe emploie des guetteurs afin de pister les va-et-vient de la police locale. Bref, tout se fait à l'arrache avec un budget dérisoire.
Le résultat ?... Un produit bis qui ne pâlit aucunement face à d'autres métrages du genre bien mieux lotis en terme de subventions. Ici, pas grand chose n'est pleinement réussi si ce n'est que le travail effectué sent la sincérité à plein nez. Avec quelques dollars, Mendez ne s'interdit rien et s'investit dans un délire où se côtoient des nonnes fluorescentes aux crocs acérés, des filles badass customisés de cuir et vidant leurs shotguns sur des hordes zombifiées, des suppôts de Satan jouant les queers de cathédrale, des crucifix animés adeptes de gangsta rap, des bouledogues verts fluo, des flics abrutis (incarnés par le rappeur Coolio et le talentueux Bill Moseley), des curés adeptes de l'avortement sauvage, un fétichiste des dessous féminins portés et le sempiternel groupe de jeunes glandus fin prêts à se faire dépecer pour le plus grand plaisir de spectateurs adulescents se goinfrant de pop-corn et de sodas pour l'occasion.
Le Couvent est simplement un pur produit bis pour un public spécifique. Un public qui n'a rien à faire du scénario, ni de la crédibilité des situations. Un public de fans hardcore du genre qui est venu voir des nonnes, plus portées sur L'Enfer de Dante que sur les Saintes Écritures, qui vont se faire magistralement dessouder par Adrienne Barbeau et la jeune Joanna Canton, cette dernière étant recouverte de sang tel Bruce Campbell dans le célèbre Evil Dead II.
Alors bien sûr, Mike Mendez est loin (très loin, même) d'avoir le talent de Sam Raimi. Mais offrir un spectacle d'un tel acabit, aussi sanglant, tordant et fou avec trois fois rien et sans se prendre au sérieux une seule seconde reste néanmoins très rare. Et en ce sens, à moins d'être acariâtre, il est impossible de bouder son plaisir.