On ne peut pas dire que je sois un grand fan de l'absurdité des films de Quentin Dupieux. Mais là, avec Le Daim, quelque chose de plus menaçant se profile derrière son humour. On est habitué avec lui au non-sens, à l'incongruité de ses personnages, à l'incohérence de ses sujets. Ces éléments se retrouvent dans Le Daim, mais accompagnés d'un facteur réaliste qui ne condamne pas son récit à une lecture purement rigolote.
Ici, on suit un homme qui décide de tout abandonner pour s'isoler en montagne où il tombe éperdument amoureux de sa veste en daim. Drame, comédie noire, thriller, horreur, on sait jamais sur quel pied danser mais une chose est sûre, Dupieux n'a jamais aussi bien filmer la folie. J'ai adoré l'atmosphère poisseuse et dépressive qui émane de la mise en scène. Les plans sont brefs et efficaces, le développement va droit à l'essentiel (1h17 de film).
On rigole beaucoup et de tout jusqu'à un point de non-retour où l'absurde franchit la limite du fait-divers. C'est là qu'on se dit que Dupieux frappe fort car il cerne une réalité effrayante par le biais d'un personnage banalement atypique ! Le scénario, en apparence simpliste, est en fait peaufiné en détail, surtout dans l'évolution de la folie de Georges, son personnage principal. Certes, on peut se contenter de la relation décalée et grotesque de l'homme avec sa veste, mais on peut aussi voir plus loin ; Georges, ça pourrait être n'importe qui. Le film est barré mais l'interprétation de Jean Dujardin le rend entièrement plausible et accessible. En effet, il ne va pas incarner la folie "à l'américaine" mais le plus normalement possible, en le rendant très terrien et concret. On y perçoit alors toute une densité complexe qui questionne sur son passé et les raisons de cet état. Adèle Haenel, que je ne peux pas voir en peinture d'habitude, se fond très bien dans le décor montagnard.
Ce Daim est une très bonne surprise, sur plein d'aspects, très prometteur car vecteur de sens tout en préservant ce qui fait sa singularité et sa force.