On pense parfois à tort que Le grand bleu est le premier film de Luc Besson, puisque c’est celui qui l’a fait connaître. Mais ce film n'est « que » son troisième, sa première création pour le cinéma date de 1983 et traitait déjà de science-fiction, une marotte chez le réalisateur.
Mais, contrairement à la SF pop et colorée du Cinquième élément ou de Valerian et la Cité des mille planètes, celui-ci tranche visuellement, puisqu'il se situe dans un monde post-apocalyptique particulièrement dur, où chacun vit de peu, survit avec ce qu'il trouve, et doit se méfier des quelques survivants. Il ne semble plus y avoir de femmes, et tous ont perdu la parole. Ce qui laisse d'intéressantes pistes de réflexion sur ce qui a pu arriver.
Dans cet univers hostile, le héros, incarné par Pierre Jolivet, se réfugie auprès d'un vieux médecin, joué par Jean Bouise, qui a réussi à se créer un havre de sécurité. Tous deux vont progressivement tenter de se comprendre, puis s’apprécier. Mais ils doivent se méfier d'un étrange homme, une bête maligne et dangereuse, incarnée par un Jean Reno glaçant.
Le film est d'une étrange beauté, tout en noir et blanc, avec ses aplats de blancs, ses ruines, ses décors abîmés en nuances de gris. Le transfert sur Blu-Ray le magnifie, d'une propreté et d'une finesse incroyables, même s'il faut bien comprendre que cela se fait au détriment de l'ambiance sale de la pellicule d'origine. Les costumes en matériaux de récupération sont recherchés, incroyablement crédibles, le film n’est en rien kitsch.
C'est assurément un premier long-métrage qui lance de belle manière une carrière. Il est vrai qu'il ne vient pas de nulle part, que La Jetée de Chris Marker a pu l'influencer et qu'il s'était déjà fait la main sur un court-métrage, L'Avant-dernier combat. Celui-ci a d’ailleurs été tourné avec une partie de la même équipe technique, il le préfigure. Mais la qualité n'a rien à voir, le court fait trop série Z, alors que le grand fait figure de respectable représentant de film de SF, il a été travaillé et étudié pour ne se distinguer du tout venant du genre.
Le Dernier combat est une belle claque, visuelle et narrative. Le film est dur, violent mais aussi beau et poétique, où le noir et blanc met en valeur un monde qui a perdu ses couleurs mais aussi ses mots. dans Il est oublié de nos jours, éclipsé par ses petits frères. Et puisqu'il est facile de tacler Luc Besson sur ses derniers films, personne n'est venu à la rescousse du Dernier combat.
Je rattrape, à mon niveau, cette injustice.