En genre et contre tout!

S'il y a bien un film qu'on n’a pas vu venir en salle, surtout vu le contexte actuel, c'est Le Dernier Voyage. Premier film de Romain Quirot, prolongement de son court-métrage de 2014 « Le Dernier Voyage de l’énigmatique Paul WR », pré-sélectionné pour les Oscars à l'époque et récompensé dans bon nombre de festivals.

Après 5 ans de travail acharné pour pouvoir monter le film, le résultat est à la hauteur.

Entendons-nous, le film est loin d'être parfait et beaucoup de défauts inhérents à un premier film sont présents.

Le scénario souffre parfois ici et là d'un petit manque d'étoffement notamment sur l'univers qu'il essaie de mettre en place.

Certaines séquences auraient mérité des liaisons moins sèches et il est vrai que parfois on sent légèrement le manque de moyens.

Non pas que les décors, les maquillages soient ratés et encore moins les effets visuels. Tous ses éléments sont justement la grande réussite du métrage.

Mais il se ressent dans certaines pirouettes de mise en scène notamment en jouant sur le son et les très gros plans quand le film ne permet pas de mettre en large certaines grosses séquences.

Mais au delà de tout ça c'est une vraie réussite et on sent que Quirot fait parti de cette génération bercée à la BD de Mézières, Metal Hurlant, en passant par les films SF qui s'en inspiraient comme Blade Runner ou encore Mad Max.

On retrouve un peu de tout ça dans Le Dernier Voyage mais le metteur en scène -qui cadre également lui-même- vient justement de la BD et n'oublie jamais de creuser son propre sillon en imposant son histoire que certains diront basique. Certes, elle l'est, mais l'important est ailleurs.

L'important, c'est que le métrage de Quirot prouve, s’il le fallait, que le film de genre en France a vraiment de l'avenir et que notre pays a ce qui se fait de mieux dans le domaine de la technique et de la mise en images.

Le casting est également intéressant. Hugo Becker toujours impeccable reprend logiquement le rôle qu'il tenant dans le court métrage tout comme Bruno Lochet. Jean Luc Couchard et Emilie Gavois Kahnn reviennent eux dans des rôles différents. La jeune Lya Oussadit Lessert est la jeunes révélation du film ainsi que Paul Hamy qui se révèle un peu plus au yeux du grand publics et qui est juste incroyable dans le rôle de Eliott. À la fois burlesque mais aussi terriblement flippant. Philippe Katerine lui fais le job en hologramme radio..

En parlant de radio à noter la bande originale de Étienne Forget (Hero Corp, Mission, La Forêt) qui décidément devient un compositeur important dans la création française et le choix très décalé des musiques un petit peu désuète marche très bien. Rien que pour la petite baston sur du Eddy Mitchell ça vaut le détour.

Un big up particulier aux personnes de Digital Discrit qui ont fini de convaincre les financiers que le film était faisable. Chaque image, chaque plan. Tout ce que vous voyez a été story-boardé pour être le plus précis possible et le plus efficace pour les vingtaines de jours de tournage. Ce qui est très peu.

Et ce n'est que le début puisque le monsieur prépare actuellement l'adaptation de sa dernière saga de romans, Gary Cook, qui se passe dans un monde futuriste couvert d’eau, en série. Et d'autres projets avec ses producteurs, qui sont assez fous pour lui faire confiance. Tant mieux, on sera assez fou pour aller les voir.

Dévoreur de BD, metteur en scène, amateur de genre, cadreur et monteur. Quirot est un réalisateur à suivre de très très près.

Avec Le Dernier Voyage et son budget plus que modeste pour une telle production, Quirot n'a pas a souffrir face au 200 000 millions de Valérian et son scénario tout pété !! Alors bravo à lui et toutes ses équipes qui maintiennent l'espoir d'un cinéma de genre français sur grand écran dans lequel il s'engouffre avec talent.