Pour une introduction au cinéma d'Antonioni, je suis plutôt mal tombé. Dieu que ce visionnage était pénible !
Et pour cause, si Antonioni a pu marquer son époque avec un cinéma considéré alors relativement expérimental, la découverte de Deserto Rosso aujourd'hui est une expérience punitive. En effet, si l'on pourra toujours saluer la fougue d'un réalisateur qui s'affranchit volontairement des conventions scénaristiques pour communiquer son propos, dans le cas du premier film couleur d'Antonioni, celui-ci est tellement maigre, tellement convenu et transparent qu'a aucun moment le procédé n'acquiert de véritable légitimité.
On suit ici les pérégrinations d'une jeune bourgeoise névrosée vivant dans une zone industrielle de Ravenne, atteinte d'un mal indicible, en rupture avec un environnement auquel elle ne sait pas s'adapter, et qui se perd en tirades interminables où chaque émotion est surjouée, pour dire, en deux mots comme en cent, qu'elle ne sait pas ce qu'elle veut et ce qui lui arrive.
Les tics d'Antonioni (prolongement des plans, cadrage décentré etc.) apparaissent comme complètement gratuit, et on a presque envie de proposer -d'une façon quelque peu mesquine- que si le but est ici encore de souligner l'incommunicabilité, pourquoi pas, alors, tout simplement s'être abstenu de faire un film ? Le résultat aurait alors été encore plus provocant pour ceux que ça intéresse et satisfaisant pour les autres.
Car en esthétisme aussi, la pellicule est avare : la beauté d'un paysage industriel et urbain qui évolue, lui-aussi, naturellement et imprévisiblement au fil de son délabrement, n'est ici -bien que ce soit un des thèmes principaux du film- pas vraiment l'objet d'une contemplation.
Les plans resserrés d'Antonioni, sur des personnages qui n'en finissent plus de parler pour ne rien dire, ne nous laissent jamais vraiment apprécier ces paysages salement anthropisés que Tarkovsky ou Bela Tarr -parmi d'autres- ont su filmer avec génie.
Enfin bref, Antonioni fait partie de ces cinéastes provocateurs mais quelque peu badins, qui divisent (comme toute une partie de notre nouvelle vague), et je reste un sceptique.
Je jetterai tout de même un œil à La Notte qui me semble plus consensuel.