« Ce qui m'a poussé à faire ce film, c'est le gâchis qu'on a fait de tout. C'est cette civilisation de masse où bientôt l'individu n'existera plus. Cette agitation folle. Cette immense entreprise de démolition où nous périrons par où nous avons cru vivre. C'est aussi la stupéfiante indifférence des gens, sauf de certains jeunes actuels, plus lucides. » (Robert Bresson). Le diable probablement, un titre splendide pour un film splendide sur les désillusions qui ont suivi mai 68 et son espoir de changer le monde. Le film est empreint d'un désespoir face à la folie du monde, sa violence et sa cruauté. On est d'ailleurs sidéré de voir que tous les problèmes écologiques sont déjà clairement posés en 1976 et que nous n'avons rien fait depuis plus de 40 ans ! Le monde nous tue comme il tue Charles dans une scène finale absolument bouleversante. Ce qui fait du film de Bresson un chef-d'œuvre, c'est surtout l'adéquation du fond et de la forme, cette manière qu'il a d'exprimer la fatalité, le tragique, par des plans qui démarrent souvent quelques secondes avant l'arrivée des acteurs dans le champ, et se terminent quelques secondes après leur sortie, comme si ces plans leur préexistaient. Les personnages sont comme prisonniers du cadre et leurs déambulations ne font que souligner leur tragique impuissance. Un chef-d'œuvre d'une force incroyable, bien que réalisé avec très peu de moyens, avec une austérité volontaire