Le bon docteur

Après ses deux derniers chefs-d’œuvre oscarisés, le fresquiste David Lean nous dépeint cette fois une page d’histoire russe racontée huit ans plus tôt par le romancier Boris Pasternak. Un film à la fois romantique et critique envers une idéologie pervertie par ses extrémistes. Tout comme la plupart des grandes religions, le communisme est parti d’une prémisse de justice pour devenir une dictature s’attaquant à la liberté de conscience et aussi cruelle que les pires tyrannies. À la veille de la première guerre mondiale, Youri Jivago, à la fois médecin et poète, se voit ostraciser par ses camarades bolchéviques pour sa poésie jugée trop individualiste. Pourtant il a tout d’un homme d’une grande humanité même déchiré entre deux amours : Tonia sa demi-sœur qu’il épouse et avec qui il fonde une famille et Lara, une femme d’une beauté extraordinaire mariée à un leader révolutionnaire et harcelée jusqu’au viol par un beau-père narcissique. Certains pourraient reprocher le côté à l’eau de rose des relations amoureuses du bon docteur, mais l’ensemble demeure une fois de plus une grande réussite. Le cinéaste prend trois ans à préparer ses longs-métrages et ça se voit à l’écran. La cohésion fait son œuvre : la scénarisation, la construction dramatique, la beauté des décors, la prise de vue, le jeu des acteurs, tout se tient. Et puis il y a la distribution qui lui rend l’honneur. Omar Sharif est juste en médecin amoureux. Ses partenaires Geraldine Chaplin et Julie Christie le sont tout autant et le triangle amoureux est bien appuyé par les vétérans Steiger et Guinness.