Cette critique spoile allègrement le film. Vous êtes prévenus.
Le film se moque effectivement d'être incohérent historiquement. À chacun de juger si cela nuit à sa capacité à être apprécié. Pour ma part, j'ai peu relativement facilement me défaire de "défaut", même si certains passages sont un peu gros.
Le film en lui-même m'a plutôt touché, essentiellement grâce aux jeux de ses acteurs. Des mimiques quasi facétieuses de David Thewlis (bien que son personnage Ralf soit des plus sérieux) à la crédulité sans limite de Bruno (Asa Butterfield), en passant par la frimousse usée de Shmuel (Jack Scanlon) et la pleine humanité d'Elsa (Vera Farmiga).
L'histoire est plutôt cousue de fil blanc, mais quelques subtilités viennent la magnifier - le côté "sens du devoir" à deux vitesses de Ralf vis-à-vis des membres de la famille qui sont des traitres au Fatherland, la réalisation d'Elsa de l'horreur qu'elle fréquente au quotidien ou certains passages avec la vision infantile de Bruno, e.g par rapport à la reconversion de Pavel (David Hayman). Néanmoins, d'autres me paraissent quelques peu maladroits, comme la violente plongée de Gretel (Amber Beattie) dans le nazisme ou encore les cours à domicile qui ne sont même pas surveillés de loin par les parents.
D'ailleurs, si la fin me semble être une réussite en terme de réalisation, je ne sais trop quoi penser de l'idée, ou de la manière dont elle est amenée. Le passage de Bruno dans le camp va un peu vite, et même si les images peuvent être poignantes, je me suis un peu senti "forcé" vers cette fin. Je ne sais pas comment c'est fait dans le livre, si c'est amené de manière plus subtile, mais c'était un défaut du film à mes yeux.
J'aime néanmoins l'idée que Bruno n'ait pas le temps de réaliser tout à fait ce qu'il lui arrive. Cela me paraît mettre de l'emphase sur ce que pouvait réellement ressentir un prisonnier d'alors, mais d'un autre point de vue.
Enfin, pour en revenir aux incohérences historiques, le fait qu'il y ait un enfant à Auschwitz ne me dérange pas si ça sert l'histoire, le fait qu'il ait autant de temps libre et soit si peu surveillé me fait beaucoup plus tiquer. De même pour les autres facilités scénaristiques : la terre meuble juste devant le grillage, le décès de la grand-mère sous les bombardements, le fait que la famille comprenne immédiatement ce qu'il s'est passé alors même que le camp n'a pas été totalement retourné. Et que dire du cliché de la pluie qui se met à tomber et du tonnerre qui gronde au moment d'annoncer le drame ?
J'ai tout de même passé un bon moment devant le film, et j'ai été touché par les personnages. Mais j'en ressors avec un petit goût amer tout de même !