Ça y est : EN-FIN. Oui, j'ai 33 ans, vu des milliers de films et pourtant je ne m'étais jamais plongé (métaphore subtile) dans « Le Grand Bleu », véritable phénomène commercial à sa sortie malgré une presse hostile, permettant à Luc Besson d'écrire son nom en grandes lettres parmi les réalisateurs comptant dans l'Hexagone. Et j'avoue que je suis vraiment partagé. Il y eut des moments où je n'aimais pas beaucoup ce que je regardais, m'ennuyais. En fait, je crois même que je me suis ennuyé une majorité du temps, l'œuvre souffrant de trop nombreux défauts pour viser plus haut artistiquement.
Déjà, ces problèmes d'écriture, notamment dans les personnages, ces difficultés à enlever certaines scènes pourtant très dispensables, rendant le résultat parfois bouffi, et ce alors que l'auteur de « Léon » dit avoir taillé massivement dans le vif (peut-être aurait-il fallu en mettre d'autres à la place...). L'interprétation n'est également qu'à moitié convaincante, le duo Jean-Marc Barr - Jean Reno ne parvenant jamais vraiment à traduire la relation complexe unissant les deux hommes (pas non plus aidés par les dialogues, j'en conviens), au contraire d'une Rosanna Arquette souvent radieuse, dont on a du mal à comprendre la fascination pour cet homme n'en ayant manifestement pas grand-chose à foutre d'elle.
Et pourtant, je peux (en partie) comprendre le succès du film. Même si je suis surpris de voir un public souvent jeune ne pas avoir été gêné par autant de longueurs (certes, ils ont vu la version de 130 minutes, mais quand même!). On peut dire ce qu'on veut de Besson, mais ce mec a le sens de l'image. Aussi maladroite soit-elle, ce dernier réussit à créer une ambiance singulière, parfois hypnotique, que ce soit à travers cette très belle photographie (élégante idée que cette introduction en noir et blanc) et surtout ce travail sur le son impressionnant (au passage, la composition d'Eric Serra se révèle parfois inspirée), cette combinaison proposant une immersion parfois totale avec la mer, ces concours de plongée, finalement (trop) peu présents, montrant des moyens techniques clairement à la hauteur du défi fixé.
Et puis il y a cette fin, là encore grandement raccourcie au montage (pour le coup, c'est un peu dommage, mais confirme mon impression de déséquilibre), offrant des visions puissantes, fortes, laissant entrevoir un réel talent de cinéaste. Finalement (comme cela lui arrivera encore), « Le Grand Bleu » réunit le meilleur et le « pire » de Besson, une œuvre éminemment personnelle, souvent maladroite et un peu vide tant on peut y interpréter presque tout et n'importe quoi. N'empêche, lorsque j'ai enlevé mon casque et suis revenu à la réalité, j'avoue avoir eu du mal à revenir sur la terre ferme, preuve, malgré tout, que l'ami Luc a réussi une partie de son pari.