Fantastic Mr Fox
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le 28 juin 2017
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Long-métrage d'animation de Benjamin Renner et Patrick Imbert (2017)
Sorti en 2015, Le Grand Méchant Renard de Benjamin Renner a été une adorable surprise, drôle et touchante histoire d’un renard empêtré dans une paternalité de poussins. La choupi bédé a bien mérité ses nombreuses récompenses.
Bien sûr, nous sommes sur Senscritique, patrie du cinéma, où les autres domaines culturels sont oubliés. Le site préfère courtiser les annonceurs de l’audiovisuel, aux budgets de comm’ bien plus appréciables.
Lisez donc la BD, de dieu ! Elle est excellente. Les librairies ou les médiathèques de bon goût l’ont forcément dans leurs rayons. Mais heureusement pour les allergiques à ce format (tsk tsk) celle-ci a été adaptée par son créateur, Benjamin Renner, accompagné de Patrick Imbert. Tous deux ayant reçu deux César du film d’animation, le premier pour Ernest et Célestine en 2002 (avec Vincent Patar et Stéphane Aubier ), le deuxième depuis pour Le Sommet des Dieux en 2022. Et donc un pour ce Grand Méchant Renard et autres contes…, lui aussi auréolé de la prestigieuse récompense française. C’est du sérieux, au moins dans l’application, le film étant d’une amusante légèreté mais plein d’esprit.
Le long-métrage adapte donc cette œuvre phare pour les petits et les grands et les autres mais aussi deux autres histoires de Benjamin Renner, d’où cette mention de contes. Le cadre de départ est le même, une petite ferme où les animaux sont rois, chacun allant avec sa petite personnalité bien attifée. Le premier et le troisième segment, Un bébé à livrer et Il faut sauver Noël reprennent les mêmes personnages, un petit cochon pragmatique et ses deux amis, un canard et un lapin, délurés et inconscients, tandis que le deuxième est à l’honneur de ce renard maladroit, faux gredin au grand coeur, et de ses poussins. D’autres créatures se retrouvent de l’un à l’autre, dont le nonchalant chef de ferme, à l’écart de toutes les agitations. Il est regrettable que ces segments ne soient pas mieux interconnectés, en dehors de l’apparition de quelques figures, ce qui témoigne des conditions de production : Benjamin Renner et Patrick Imbert se sont partagés les segments.
Pour être plus précis, ces trois histoires sont reliées entre elles par une scène de théatre, pour mieux rappeler la fictionnalité de l’entreprise. Une idée qui n’était pas forcément nécessaire, à la vue de la fantaisie des segments. Les petites interludes proposés sont amusants, mais ne sont que des amuse-bouches qui font monter la sauce, alors qu’on n’attend qu’une chose, c’est d’arriver au prochain segment.
N’y trouvez là que des critiques de fine bouche, car Le Grand méchant renard et autres contes… est une belle réussite, dont on aurait aimé plus, encore plus. Il est cruellement court, avec ses 1h20, générique et intermèdes théâtraux compris. Alors il faut savoir apprécier ce qui est proposé, et en saluer les qualités.
Ne nous attardons pas sur les histoires, pour mieux distinguer ce qui fait qu’elles sont si attachantes. Bravo aux personnages, tous bien développés, dans cette petite fantaisie juvénile adorable, sans grand sérieux. Les dialogues sont formidables, ils sont efficaces, les échanges fonctionnent, certaines répliques sont hilarantes. Le générique de fin commence en remerciant longuement les doubleurs, les annonçant un par un avec leur personnage, et c’est une charmante attention. Il faut leur reconnaître une implication plus que professionnelle, faisant vivre chacun des personnages, leur donnant une voix, une personnalité. Guillaume Darnoult, Damien Witecka, Kamel Abdessadok, Antoine Schoumsky et tous les autres, bravo à eux. Ils sont tous des professionnels du doublage, et cela se ressent, cela n’a rien à voir avec cette agaçante manie d’inviter des personnalités à assurer les voix, pour des prestations parfois réussies, souvent décevantes, et qui servent avant tout le marketing plutôt que la qualité artistique du film.
Et il y a ce ton, cette fantaisie animalière pleine de bonne humeur, de rires, mais avec aussi des moments plus calmes, qui rythment le récit. Les personnages principaux n’existent pas que pour leurs mésaventures, mais aussi parce qu’ils sont complets, dévoilant des facettes plus contrastées : le désarroi du cochon dans le premier segment ou cette paternalité contrariée qui va s’imposer au renard. Le film ne prend pas les enfants pour des idiots, mais accompagne aussi les parents dans son monde, proposant de petites touches qu’eux seuls percevront, et notamment sur l’éducation (cf. ces adorables poussins qui veulent être des renards, en rebellions contre leur « maman »).
Le trait de Benjamin Renner, malin et gracile, est bien sûr conservé, avec une fidélité étonnante, ce n’est pas toujours le cas dans ce genre d’adaptations. Ses personnages ont toujours ces petits bouilles caricaturales et amusantes, du bon tonneau dont on fait les meilleurs fables animalières. L’animation déborde de vie. Certains décors ou plans choisis sont assez réussis, très jolis. Avec toujours cette volonté de créer ce petit supplément d’âme, ces détails qui font les différences : les intérieurs de la niche du chien de garde ou de la poule sont de vrais petits nids douillets, aménagés avec soin. Et même quand le film fait parfois le choix de l’économie, il le fait avec malice, à l’image de cette séquence où les personnages se retrouvent dans un carton, l’écran est plongé dans le noir et on ne voit que leurs yeux. Et pourtant, le spectateur va aussi vivre les tribulations de ce carton, juste par le pouvoir d’une évocation travaillée sur les yeux, les dialogues ou les bruitages.
D’une grande maîtrise technique dans sa simplicité et sa bonne humeur, d’une grande maîtrise dans l’écriture de ses personnages, Le Grand Méchant Renard… est ainsi une belle bouffée d’air frais, drôle, parfois émouvant. Qui réussit cet exploit rare de se mettre à niveau aussi bien des petits que des grands. Facétieux et amusant, terriblement attachant, c’est une belle réussite qui accueille si bien le spectateur qu’il en veut encore plus. Avec ce petit monde animalier bien installé, espérons que Benjamin continue à de telles petites pépites pour les faire vivre avec le public.
En film ou en BD (lisez la BD, de diou!).
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Créée
le 15 août 2024
Critique lue 10 fois
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