Sous le vernis de la comédie de Noël, le Grinch de Ron Howard est un film baroque et grinçant, où l’exubérance visuelle sert d’écrin à la satire sociale.
Adaptation libre et thématiquement dense de l’œuvre de Dr. Seuss, le film dépasse ses apparats pour scruter les travers d’un consumérisme débridé, l'effervescence des fêtes, l’isolement et la société.
Chouville, caricature outrée où Noël n’est plus qu’une apothéose de matérialisme. Ici, le sacré se perd dans une compétition effrénée de décorations scintillantes, de montagnes de cadeaux, et d’une célébration vidée de son sens. Les décors kitsch et démesurés, tout comme les costumes criards, amplifient ce tableau saturé d’excès et de superficialité. Face à cette orgie colorée, le Grinch, retranché dans sa tanière, devient le contrepoint désenchanté.
Jim Carrey s’approprie ce rôle avec une intensité électrique, mêlant slapstick et sarcasme. Son interprétation, oscillant entre grotesque et pathétique, confère au Grinch une humanité paradoxale, bien que son jeu frôle parfois l'excès caricatural.
La rédemption finale, bien que marquée d’une mièvrerie attendue, soulève une interrogation subtile : peut-on retrouver sa place dans une société sans s’y conformer totalement ? Si Chouville finit par accepter le Grinch, c’est en grande partie parce qu’il consent à participer à ses rituels ostentatoires. Une réconciliation certes touchante, mais teintée d’un certain conformisme qui laisse planer le doute.
Malgré un rythme parfois précipité et une mise en scène foutraque, Le Grinch réussit à interroger, derrière ses oripeaux criards, la nature même de notre rapport aux fêtes et à l’altérité. Un théâtre de l’excès, à l'instar de l’esprit de Noël contemporain.