La fin d’un monde
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Décidément Visconti aime travailler sur les fins de règne : d'abord Le guépard puis Les damnés et enfin Ludwig ou le crépuscule des dieux.
Le guépard est un film passionnant mais complexe, à voir et à revoir pour en apprécier les différentes subtilités, les mouvements des personnages qui ne cessent d'évoluer, de se heurter les uns aux autres.
Le prince Salina (Burt lancaster), vieil aristocrate sicilien qui voit et finit par accepter avec lucidité le pouvoir lui échapper au profit d'une bourgeoisie naissante. L'évolution du comportement du personnage tout au long des 3 heures du film est saisissante : on passe d'un homme imbuvable, tonitruant, maître après Dieu de sa terre et de ses habitants à quelqu'un de profondément humain, qui sait qu'il doit passer le relais et qui l'accepte car c'est un ordre nouveau qui apparaît mais un ordre quand même. La scène magnifique, pendant le bal, de l'hommage de Claudia Cardinale à Lancaster sous l’œil de Delon est d'une beauté à couper le souffle.
Le comte Tancrède, neveu du prince Salina (Delon), opportuniste, plein de vie, pleinement adoubé par Salina, va savoir unir les 2 mondes à son profit ; on devine à la fin qu'il se lancera dans la politique, un autre façon de se maintenir au pouvoir.
Angelica (Claudia Cardinale), de basse extraction mais belle à damner tous les saints, représente le renouveau de la société. Et comme le dit Lancaster lui-même, elle représente la vie bien mieux que ses propres filles laides comme des guenons (dixit) à force de mariages consanguins.
Et puis, le père de Claudia Cardinale, le maire du village, fruste, propriétaire et nouveau riche, celui qui s'empare du pouvoir et établit un nouvel ordre, pas pire que l'ancien...
Sans oublier Don Francisco (Serge Reggiani), homme du peuple qui reste fidèle à l'ancien régime par reconnaissance.
Et l'Eglise dans tout ça ? Eh bien, elle s'adapte au nouveau pouvoir, comme d'habitude. Elle est représentée par un Jésuite, confesseur du Prince. Comme dit le Prince à son confesseur qui tarde un peu à prendre le virage, "est-ce que l'Eglise ne sacrifierait pas l'aristocratie pour se maintenir en place ?"
D'un point de vue technique, l'image de la Sicile, des personnages, du bal, etc... est splendide et la réalisation superbe et puissante.
Je ne citerai que la longue scène initiale où la caméra, indiscrète, s'approche lentement de la salle où a lieu la prière collective comme si elle était attirée et fascinée. Et une fois dans la pièce, l'apparente ferveur et "communion" de l'ensemble de la famille apparaît peu à peu factice et se délite à l'annonce des perturbations à venir.
Film magnifique dont on ne voit pas passer les 3 heures. Palme d'Or en 1963 à Cannes pleinement méritée. A recommander. A posséder chez soi pour le plaisir de se replonger dans le tourbillon de l'Histoire.
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Créée
le 13 juin 2020
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