Entre pédagogie et hagiographie (on n'en est pas loin parfois), Le jeune Karl Marx a pour rude mission de remettre dans leur contexte un homme et ses idées. Mais le titre du film est trompeur, Engels a tout autant d'importance dans le récit et son personnage est d'ailleurs bien plus captivant : issu de la bourgeoisie et se mêlant volontiers aux ouvriers, il sait de quoi il parle et n'a pas cette arrogance affectée dont le très intellectuel Marx est affligé. Quoi qu'il en soit, le film aurait dû s'appeler Friedrich et Karl, histoire d'une amitié et de convergences de vues dans une Europe pré-révolutionnaire. Le film passe parfois par de longs tunnels didactiques et l'on a l'impression d'être dans une version filmée de Les bases du communisme pour les nuls. L'aspect romanesque des vies de nos deux héros est cependant évoqué avec bonheur, que l'on doit notamment au beau tempérament des deux actrices qui les incarnent. Grâce au personnage d'Engels, le film ne manque pas sa reconstitution de l'industrie de l'époque et les combats idéologiques sont relativement bien illustrés avec notamment les figures de Proudhon et de Bakounine alors que le Dropping Names qui menace se limite à peu près à Courbet. La réalisation de l'haïtien Raoul Peck n'est pas d'une légèreté folle et frise un peu l'académisme mais on n'attendait pas un film révolutionnaire, si l'on ose dire. Prolétaires de tous les pays, la vision de ce film est loin d'être inutile pour comprendre peu ou prou ce qui mouvait Marx et Engels. Comme un préambule à la lecture du Capital ? Euh, oui, pourquoi pas ?