C’est dans le registre dramatique que l’on retrouve l’auteur de Diamants sur Canapé aux commandes de cette chronique sur les méfaits de l’alcool et ses conséquences sur la vie d’un couple merveilleusement interprété par le duo Lemmon/Remick.
Sur un scénario du dramaturge P.J. Miller, Blake Edwards dresse un portrait saisissant de la lente dérive d’une liaison débutée comme dans une comédie romantique à la Billy Wilder - réalisateur de The Lost Weekend (Le Poison en France) l’un des classiques incontournables traitant du sujet de l’alcoolisme - pour aller crescendo vers une inexorable descente aux enfers.
Jack Lemmon, l’un des acteurs américains interprétant le mieux le cadre moyen américain, empathique et un peu gaffeur, y réussit une performance époustouflante dans un registre inhabituel, je pense notamment à ces scènes où il est emporté dans des accès de delirium-tremens ou lorsque sous l’effet de l’addiction il se met à rejouer faussement ses compositions sur le ton de la comédie absurde.
Le film commence comme l’une de ses comédies traitant du boom économique américain, sans jamais oublié d’en montré les côtés négatifs : le surmenage lié à la pression de la performance, les effets dégradants de la concurrence, les faux-semblants liés à la réussite à tout prix, tout ça se concluant par un pot de fin de journée qui s’éternise pour donner à l’alcool le goût de la fatalité, tout ce qui mène à la dérive de ce couple d’américain « idéal ».
Ne jouant jamais sur le registre du film moralisateur, Edwards parvient à dresser un portrait percutant qui sait taper juste sans jamais appuyer grossièrement sur les traits du mélodrame larmoyant. Il film cette dérive comme s’il filmait l’une de ses comédies de mœurs, registre dans lequel il saura briller par la suite, sauf qu’ici la cocasserie naît dans la bonne humeur de la douce ivresse, tend peu à peu vers une sorte d’inexorabilité qui conduit ce couple vers l’anéantissement pur et simple. Ce que l’on peut aisément considérer comme une descente aux enfers.
A noter un excellent travail du chef opérateur Philip H. Lathrop, qui avait déjà officié sur le Breakfat At Tiffany’s, le travail sur la photographie est impeccable et parvient parfaitement à donner à cette dérive progressive une teinte de gris délavé.
Le jour du vin et des roses, au titre sonnant comme une romance douce et enivrante, est l’un des films les plus percutants sur les dérives de la picole et sa fatalité et reste à ce jour absolument inégalé.