Ambitieux sujet pour un film qui l’est tout autant, « Le labyrinthe du silence » remet sous la lumière le fameux procès de Francfort qui s’est tenu entre 1963 et 1965, sous l’impulsion du procureur Fritz Bauer, et où comparaissaient 22 prévenus coupables de crimes de guerre à Auschwitz. Il avait la particularité par rapport à celui de Nuremberg ou celui de Cracovie de se passer en Allemagne, 20 ans après les faits. C’est ce contexte très particulier qui est évoqué ici non pas sous la forme d’un docu-fiction, mais en y apportant, avec la création du jeune procureur Johann Radmann, une vision romancée, permettant au réalisateur de prendre une distance subtile avec la réalité des faits et surtout de construire un film tout public. Bien évidemment le fait de suivre ce jeune « shérif » dans les moindres détails de sa vie personnelle et sentimentale peut altérer, chez certains spectateurs, le propos. Cela se vérifierait si la reconstitution précise de la genèse de ce fameux procès n’était pas aussi brillante, et ne renait le dessus. Mécaniquement nous sommes très proches de l’efficacité de « La vie des autres ». D’un peuple allemand qui peine à se remettre d’un tel désastre, jusqu’à occulter ces années noires, de ceux qui tiennent (absolue nécessité pour certains) à ce qu’on oublie définitivement, à un establishment tantôt arrangeant, tantôt psychorigide, il était difficile de monter une telle assise. Ricciarelli en démontre chacune des étapes, disséquant les comportements, distillant l’émotion avec pudeur et il amène à son film toute la rigueur nécessaire pour approcher le plus possible de la réalité tant dans le propos qu’à l’image. Ce bel exercice, est soutenu par des acteurs précieux, notamment le couple Alexander Fehling/Friederike Becht en amants entre feu et eau, sans oublier le magistral Gert Voss. En espérant que « Le labyrinthe du silence » puisse trouver son public, notamment avec les jeunes générations auquel il s’adresse principalement.

Fritz_Langueur
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2015

Créée

le 13 mai 2015

Critique lue 667 fois

4 j'aime

1 commentaire

Fritz Langueur

Écrit par

Critique lue 667 fois

4
1

D'autres avis sur Le Labyrinthe du silence

Le Labyrinthe du silence
SBoisse
7

Réparer les survivants

Je m’appelle Johann. Je suis né en 1930. J’ai trente ans. J’en avais quinze en 1945. Un jour amer, mon père au doux visage, en Russie, est tombé. J’ai vu des cités détruites, des armées refluer, un...

le 17 nov. 2016

16 j'aime

3

Le Labyrinthe du silence
Jeanne_Bertholon
9

L'Allemagne contre les Allemands

Inspiré de faits réels, le premier long-métrage du réalisateur Giulio Ricciarelli met en scène l'histoire d'un jeune procureur allemand, Johann Radmann, qui va découvrir des éléments permettant...

le 27 avr. 2015

11 j'aime

2

Le Labyrinthe du silence
Hugo_Harnois_Kr
7

Critique de Le Labyrinthe du silence par Hugo Harnois

Le spectateur pourra être surpris de voir que la majorité des allemands n'avait pas la moindre idée de ce qu'il se passait à Auschwitz, même 20 ans après. Le labyrinthe du silence aurait pu être une...

le 27 mai 2015

5 j'aime

Du même critique

Ni juge, ni soumise
Fritz_Langueur
8

On ne juge pas un crapaud à le voir sauter !

Ce n'est pas sans un certain plaisir que l'on retrouve le juge d'instruction Anne Gruwez qui a déjà fait l'objet d'un reportage pour l'émission Strip-tease en 2011. Sept ans après, ce juge totalement...

le 12 févr. 2018

59 j'aime

7

120 battements par minute
Fritz_Langueur
10

Sean, Nathan, Sophie et les autres...

Qu’il est difficile d’appréhender un avis sur une œuvre dont la fiction se mêle aux souvenirs de mon propre vécu, où une situation, quelques mots ou bien encore des personnages semblent tout droit...

le 24 août 2017

56 j'aime

10

Tale of Tales
Fritz_Langueur
9

La princesse aux petites poisses...

Indiscutablement « Tale of tales » sera le film le plus controversé de l’année 2015, accueil mitigé a Cannes, critique divisée et premiers ressentis de spectateurs contrastés. Me moquant éperdument...

le 3 juil. 2015

48 j'aime

11