En regardant Le loup de Wall Street, on ne peut que penser aux Affranchis. Les deux histoires ont plus que de simples ressemblances : un garçon, plutôt pauvre, issu d'un milieu modeste, ne désire qu'une chose, s'élever et devenir puissant. Le loup de Wall Street se place dans le milieu de la finance, alors que Les affranchis se déroulait chez les mafieux italiens. Mais le parcours est le même : succès, gloire, abus, décadence et la même trahison des siens pour sauver sa peau.

Mais il y a une différence majeure dans le style des deux longs métrages : Les affranchis est un film élégant, qui flatte le style de vie de ces mafieux. La caméra de Scorsese cherche à nous en mettre plein les yeux, à nous séduire, comme le personnage de Ray Liotta cherchait à faire tourner la tête de Karen. Avec Le loup de Wall Street, le style est violent, agressif, acharné ! La caméra bouge sans cesse dans des mouvements qui ne sont ni fluides ni doux et Scorsese joue la carte de l'attaque. Il décrit un loup et la vie de sa meute. La frénésie des images, le montage ultra-rapide, les dialogues criés et hurlés des acteurs, les insultes qui fusent en tout sens mettent le spectateur dans la plus profonde confusion ! Le chaos est presque insupportable.

L'un des défauts du film est que Scorsese s'est retrouvé coincé entre deux situations : une durée de métrage très importante (3 heures !) et la volonté de maintenir un rythme effréné tout le temps. Or, sur une telle durée, des temps morts sont nécessaires. Il y a donc des ruptures de rythme qui gênent la progression du récit (récit qui n'existe de toute façon pas). Les choses ont un peu échappé au contrôle du réalisateur et Le loup de Wall Street est davantage un film de DiCaprio qui est aussi producteur. En effet, l'acteur se réserve ici un rôle qu'il joue admirablement bien. Même s'il est la plupart du temps dans la peau d'un fou furieux, il fait preuve de nuances que peu d'acteurs sont capables d'égaler.

On comprend tout à fait ce qui a intéressé Martin Scorsese dans ce récit : la drogue, un homme qui affronte la vie (Raging Bull, Casino, Les affranchis ou encore Aviator ont aussi ce thème en commun), un homme qui se veut Dieu mais qui sait pertinemment qu'à la fin il perdra la partie (d'où cette volonté aussi de mettre si souvent leur vie en danger). Des thèmes proches du cinéaste qui lui aussi a frôlé souvent la mort.

Le film aurait gagné à avoir une mise en scène plus stable et moins dans la démonstration (ces multiples "effets" gratuits ne font que nuire au film). Nous saisissons parfaitement ce portrait d'un requin capitaliste sans scrupule (et pourtant séduisant) mais il est dommage que Scorsese n'ait pas davantage imposer des limites à ce récit qui, trop souvent, par en vrille.
busterlewis
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le 3 janv. 2014

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