Cette phrase entendue 2 ou 3 fois dans le film par des gradés prétentieux qui minimisent le rôle des Français dans la guerre d'Indochine, situe tout de suite le ton donné par le réalisateur : on est en 1964, au début de l'intervention américaine au Vietnam, le pays s'engage progressivement dans ce conflit, envoie des mecs pour servir de conseillers et dire comment il faut se battre, et au passage, on en met une petite couche pour rabaisser les Français qui d'après eux se sont fait massacrer par les Vietcongs. Le lieu de l'action est d'ailleurs symboliquement situé dans un camp français abandonné où tous ont été tués, et à l'entrée du cimetière improvisé, une pancarte porte l'inscription en français rappelant le fait d'armes de Leonidas et de ses 300 Spartiates morts pour avoir défendu le passage des Thermopyles, d'où le titre original Go tell the Spartans qui y fait allusion.
L'allusion s'appliquera également aux Américains, en dépit de leur cynisme et de leur arrogance, on connait la suite du conflit vietnamien qui sera un des plus grands fiascos militaires pour cette nation.
Ce film est courageux car il relate une vision de la guerre pas vraiment glorieuse, c'est un des tout premiers films américains sur le Vietnam, après le pionnier les Bérets verts qui a ouvert la voie, car il est sorti peu avant Voyage au bout de l'enfer et bien avant Apocalypse Now. Je regrette simplement que cette vision soit un peu floue par moments et pas montrée de façon claire, mais on y décèle des tempéraments et des points de vue différents : il y a des vétérans, des patriotes, des arrivistes, des gars fatigués, il y a ceux qui font la guerre par idéalisme, ceux qui la font par habitude, et ceux qui font du zèle ; quel que soit la méthode, tous finissent dans la boue. Le propos est donc rigoureux, le film n'est pas triomphaliste, c'est une réflexion désabusée sur un fait d'armes sans gloire qui une fois de plus, comme pour la Seconde guerre mondiale, illustre la vacuité et l'inanité de la guerre, et surtout l'incompréhension des états-majors. Je l'ai peut-être noté trop sévèrement, j'en sais rien parce que je trouve que tout ceci n'est peut-être pas assez explicite, mais c'est un film peu connu qui mérite d'être vu.