Les livres ont quelque chose de complexe et de beau que les films n’auront jamais.
J’ai fait l’erreur de visionner le film quelques jours à peine après avoir fermé le livre éponyme de John Irving.
Etant dénué du talent d’écriture des auteurs je ne me suis jamais permis de rédiger une critique d’un livre. Je n’oserais par conséquent pas écrire ici plus que quelques mots. Pour faire bref, « Le monde selon Garp » est un drôle de livre ainsi qu’un livre assez drôle. Je n’ai plus compté les moments où j’ai explosé de rire dans des lieux publics à la lecture de certains passages, suscitant la surprise et la gêne des gens qui m’entouraient. Dressant un curieux portrait de la société, ce livre réussit à traiter de nombreux sujets (et toujours d’une main de maître), du féminisme à la concupiscence en passant par une superbe mise en abîme du métier de romancier (on y lit des extraits de romans rédigés par le personnage principal du roman, un peu à la Inception version bouquin).
Et là, les magnats d’Hollywood ont vent du succès de ce bouquin et c’est le début de la fin. Ça va pêcher Georges Roy Hill oscarisé une décennie plus tôt pour l’Arnaque, les débutants mais prometteurs Robin Williams et Glenn Close et ça refile l’adaptation du livre à un scénariste qui sort de nulle part.
Résultat ? Ben Williams sort son jeu qui deviendra habituel, Close fait de même, Roy Hill signe une réal pas folichonne mais tenant la route et on assiste à un viol collectif de l’histoire originelle.
Le passage à Vienne, moment clé de l’adolescence du protagoniste (et donc de l’œuvre) est juste zappé, la mise en abîme même pas évoquée, l’un des personnages est transformé en antagoniste (Pooh Percy), détraquée étrange et vicieuse alors qu’Irving avait réussi à en faire un personnage (très) secondaire, plus profond et complexe, certains personnages sont carrément sous-exploités (Ellen James ou John Wolfe) et cerise sur le gâteau l’humour est porté disparu.
Adapter 700 pages en un film de 2h15 nécessite quelques passages sacrifiés. Soit. Mais des passages modifiés à la pelle (rien ne sert de les énumérer, ils sont trop nombreux ça rendrait ma critique encore plus ennuyeuse et ennuyée qu’elle ne l’est déjà), et de fait vidés de leur subtilité c’est juste un sacré gâchis. Quand on a une base pareille pour le script d’un film, c’est assez dur de le rendre mauvais. Mais ils y sont arrivés avec brio.
On peut néanmoins souligner la prestation de John Lithgow qui permet tout juste de supporter le visionnage du film en attendant impatiemment la fin.
John Irving a dû vomir en regardant cette bouse.
2/10