Un film de Verneuil de la toute première partie de sa carrière où il mettait Fernandel en scène.
Réalisé la même année que "l'ennemi public n°1", "le mouton à cinq pattes" est encore un agréable film sur un scénario plutôt astucieux.
En effet, quarante ans plus tôt, un petit village du Midi avait eu la gloire de voir, chez un de ses administrés, Edouard Saint-Forget, naître des quintuplés et d'être devenu un lieu d'attraction pour les touristes. Voulant faire un évènement avec le quarantième anniversaire de ces cinq enfants Saint-Forget devenus grands, le conseil municipal charge une personne, le bon docteur, de retrouver ces cinq olibrius dispersés autour du monde car ne s'entendant plus avec leur acariâtre de père.
La grande astuce du scénario est de faire jouer les rôles des cinq enfants et du père par un seul et même acteur : Fernandel …
Le grand intérêt du film est de voir six compositions très différentes du même acteur : le père est un vigneron, les cinq sont, dans l'ordre alphabétique d'arrivée sur terre, Alain, un esthéticien de renom, Bernard, un journaliste spécialisé dans les affaires de cœur, Charles, un curé qui fait rire tout le monde, Désiré, un fainéant mais pas handicapé du manche et Etienne, un capitaine de cargo.
Et Verneuil s'entend pour mettre en scène Fernandel et cette quête des cinq enfants avec une grande maîtrise.
Par exemple la scène d'introduction est un modèle du genre : Le théâtre romain local accueille une représentation du Cid qui a déjà fort à faire pour surmonter le bruit des cigales. Mais c'est le jeu de la caméra qui est intéressant. Au début, la caméra zoome sur le public où on voit les gradins pleins puis le champ s'agrandit peu à peu montrant en fait que le public est resserré sur une toute petite partie du théâtre où non seulement la troupe doit lutter contre les cigales mais aussi contre les ronflements du père Saint-Forget ...
Chacune des scènes de retrouvailles d'un des enfants Saint-Forget est l'occasion d'un bon numéro de Fernandel. Le clou du spectacle étant le suspense dans la scène sur le bateau où le Capitaine Saint-Forget joue carrément son bateau mais aussi la jolie Tahitienne sur le "coup de la mouche".
Quoique la scène avec tante Nicole se laisse bien regarder aussi ...
Ainsi que celle de Désiré avec le croque-mort ...
Mais celle de Fernandel avec YYY est pas mal aussi ...
Face à ces six et même personne, une floppée de très bons acteurs en seconds rôles comme de Funès (chevelu et ne cabotinant pas !), Chamarat, Delmont (le bon docteur), Roquevert (le blédard), Paulette Dubost (l'épouse du feignant), Dario Moreno (un matelot américain), Pâquerette (la servante du curé qui jouera la fameuse gitane "du Bossu" de Hunnebelle), Françoise Arnoul, Denise Grey, Andrex...
Bref, toute la quintessence des seconds rôles du cinéma français de l'époque.
Pour conclure, ce film est excellent et montre la palette, sans limite, des possibilités de l'acteur Fernandel qui s'en donne, ici, à cœur joie …