La grande lessive
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Le Pacha clôture la folle décennie de Georges Lautner marquée par sa collaboration avec Michel Audiard. Le réalisateur et son comparse reviennent ici au polar pur même si les bons mots du célèbre dialoguiste apportent quelques sourires. Ils incorporent dans leur univers deux monstres sacrés qui apportent une tonalité particulière à ce film, à savoir la présence unique de Jean Gabin et la musique de Serge Gainsbourg. Le Pacha, c’est la collusion du polar classique à la française en verve depuis les années 50 avec Jean Gabin en tête de pont et la modernité d’une réalisation qui fait feu de tout bois. À l’image de certaines de ses réalisations précédentes, Georges Lautner multiplie les plans baroques (une façon de travailler qui déconcerta d’ailleurs beaucoup Gabin au début) sur le rythme martial du Requiem pour un con de Gainsbourg.
C’est la grande originalité de ce film singulier à l’histoire archi-classique (un flic veut venger la mort d’un de ses collègues), au rythme étrange et au ton particulier. Le scénario en lui-même ne vaut pas tripette. Les péripéties sont nombreuses, le rythme alerte (le film dure à peine plus d'1h20) mais la personnalité de Gabin en vieux flic usé apporte beaucoup de lenteur. Autour de plans psychédéliques et de quelques fulgurances amusantes dans le verbe, le film est marqué par une véritable violence et une sombre efficacité. Dans Le Pacha, faut le dire, ça dessoude quand même sévère et les morts ne sont pas envisagés sous l’angle de la légèreté. On est dans le vrai film noir. Tant et si bien d’ailleurs que les nombreux effets de mise en scène, la musique pop de Gainsbourg et les dialogues trop souvent en forme d’aphorismes d’Audiard font que le résultat sonne un peu faux.
Si on est toujours ravi de retrouver Jean Gabin, force est quand même de reconnaitre qu’il semble ici jouer dans des pantoufles. C’est certainement parce que Gabin fait vraiment du Gabin que son personnage semble mal se fondre dans un univers empreint de modernité que le choc générationnel opère merveilleusement. Entouré d’une équipe de comédiens qui font toujours d’excellent seconds rôles, André Pousse en tête, le résultat est à voir aussi comme le témoignage d’un cinéma d’une certaine époque. Gabin, Gainsbourg, Audiard, Dalban, Pousse, Zitrone, les cascades de Rémi Julienne et les bourre-pifs d’Henri Cogan. Si ce n’est ni le meilleur Lautner ni le meilleur Gabin, l’ensemble a quand même une sacrée gueule.
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le 8 avr. 2022
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