Film d'apprentissage

Des ruelles, quelques passants, un chien et un enfant : il ne faut pas grand-chose pour nourrir un spectateur attentif. C'est à Satyajit Ray il me semble que l'on doit le précepte suivant : il n'est pas possible de réaliser un bon film sans porter de l'amour à ses personnages. Cet amour, il transparaît dans chacune des scènes du film, et, plus particulièrement lorsque Kiarostami se moque avec affection de la démarche du vieil homme ou rit avec tendresse des hésitations, des peurs de l'enfant, compatit au sort du chien laissé sur le seuil de la porte. Autre qualité de Kiarostami, sans doute plus développée encore que chez Ray : il sait diriger les enfants. Il sait faire preuve de patience et retourner la promenade avec le chien tous les jours pendant un mois jusqu'à ce que l'interaction entre le petit d'homme et le chien soit celle que l'on voit à l'écran (et peu importe ce qu'en dira l'homme à la caméra). Les clins d’œil, les petits sauts du chien, la queue qui remue, la complicité naissante autour d'un morceau de pain partagé. La musique jazzy accompagne l'action si naturellement qu'elle m'évoque un peu la scène la plus magique d'Otto e mezzo. Ce premier court-métrage ne trompe pas : y affleure évidemment la sensibilité d'un poète.