Quatre trentenaires ,amis de longue date,discutent dans la salle d'attente d'un hôpital où une de leurs copines est en train d'accoucher.Ils en profitent pour évoquer les souvenirs de leur jeunesse lycéenne,et notamment la figure de Tomasi,leur pote qui est aussi le défunt père de l'enfant à naître.Au départ "Le péril jeune" était un téléfilm produit et diffusé par Arte dans le cadre de sa collection "Les années lycée".Enthousiasmée par le résultat,la chaîne a ensuite décidé de le sortir en salles,ce qui en fait le second long-métrage ciné écrit et réalisé par Cédric Klapisch,après l'amusant et trop peu connu "Riens du tout".A l'époque il coécrivait déjà avec son scénariste de toujours,l'Argentin Santiago Amigorena,et le duo nous a concocté un joli concentré d'ambiance seventies qui est devenu pour beaucoup un film culte.C'est un peu excessif mais l'oeuvre est plutôt sympa dans sa description précise des milieux lycéens de cette période,forcément très gauchisés après mai 68.Les flashbacks se succèdent donc,les gars racontant à chacun leurs tours ces souvenirs plus ou moins enjolivés de cette post-adolescence agitée.La reconstitution d'époque est très réussie pour un film fabriqué sans moyens importants et Klapisch met ce qu'il faut d'énergie pour restituer de façon bluffante les mentalités et les préoccupations de ces jeunes d'alors,quelque part entre "Diabolo menthe" et "Mes meilleurs copains".Et c'est parti pour une bonne ration d'AG,de manifs,de brainstormings violents,de leaders chevelus à mégaphones encartés au PC ou à la CGT,voire à la LCR ou à Lutte Ouvrière,de flics et de lacrymos,de squats à hippies.Mais il n'y a pas que ça,il y a aussi la vie,les études,les drames et surtout les filles.Déjà,les cinq baltringues participent à la pseudo révolution en cours mais se tiennent à la marge,se définissant plus comme anarchistes que comme gauchistes.On les voit gérer les problèmes familiaux,préparer le bac et tenter de vivre leurs premières histoires d'amour,le Grand Soir pouvant attendre.D'ailleurs,quand on les voit vingt ans après,ce sont des bourgeois rentrés dans le rang,comme il se doit.Le seul à avoir essayé de concrétiser son utopie est Tomasi,le chef de bande,le libertaire exalté qui voulait vraiment vivre sans contrainte et s'y est brûlé les ailes.Il paiera cher sa rupture avec le système,sombrant dans la marginalisation et l'enfer de la drogue.En ce sens le film s'émancipe du brûlot militant qu'il semblait devoir être pour virer à l'amertume des lendemains qui déchantent.Le dernier plan sonne comme un sursaut nostalgique d'une jeunesse qui s'enfuit et d'une amitié égarée,avec quand même un reliquat de joie et d'insouciance.Porté par des tubes 70's principalement anglo-saxons et une musique de Joël Daydé,chanteur et guitariste aujourd'hui complètement oublié qui s'était fait connaître avec le groupe ZOO avant de faire une jolie carrière solo émaillée de quelques succès tels que l'excellent "Les matins de pluie",le film peine à trouver puissance et homogénéité pour rester assez illustratif en dépit de ses qualités.Le casting est une pépinière de futures stars.Peu connus à l'époque,les jeunes acteurs ont pour certains fait du chemin,même si d'autres ont disparu en route.Il y a évidemment Romain Duris dans le rôle emblématique de Tomasi.Pas bien fini en ce temps-là,il est plutôt ridicule en Guevara d'opérette.Vincent Elbaz,qui incarne le sportif de la bande,ne se montre pas très à l'aise non plus et a tendance à charger son personnage de gros boeuf.Nicolas Koretzky et Julien Lambroschini,le futur scénariste du "Grand bain",sont insignifiants et ne feront guère carrière,pas plus que Joachim Lombard,qui est lui très bon dans le film.Côté filles il y a Elodie Bouchez,Hélène de Fougerolles et Julie-Anne Roth,toutes parfaites dans des registres différents.De savoureux seconds couteaux sont de la partie,notamment l'anglaise Lisa Faulkner en étudiante british pas farouche,Jackie Berroyer en dealer allumé,François Toumarkine en prof cyclothymique qui se met à gueuler tout-à-trac ou Renée Le Calm,la petite vieille fétiche de Klapisch,qui est celle qui parle du fameux "péril jeune".Notes et critiques de films de Cédric Klapisch publiées précédemment:voir critique "Ce qui nous lie".Nouvelle moyenne:5,8.