On se souvient du décoiffant Coup de Scirocco, en 1979 avec Roger Hanin, Marthe Villalonga et le jeune Patrick Bruel. Le film racontait le départ d'Algérie, après 62, et l'arrivée difficile en métropole, de la famille Narboni, comme un million d'autres "rapatriés".
Là, avec Le petit blond de la Casbah, Alexandre Arcady évoque l'avant, sa jeunesse à Alger, dans cet immeuble de la rue du Lézard où tout le monde se connaît, et vit bruyamment, en bonne partie dans les coursives. Le vieil espagnol râleur du premier. la mystérieuse jolie fille célibataire du deuxième et le mélange des familles juives, arabes, et autres Maltais, Alsaciens...
comme l'était l'Algérie d'alors. Une famille plutôt colorée, dirons nous, avec le père, hongrois, 19 ans de légion, une vague ressemblance avec Yul Brynner et maladivement jaloux de sa charmante femme (Marie Gillain), mère juive qui veille sur la couvée de 5 gosses et qui jongle avec les dettes chez les marchands. Un oncle beau gosse ( Dany Brillant) un peu maquereau, et la grand-mère Lisa, 1,50m et 150 kg! ( facétieux Jean Benguigui himself !) qui surveille tout ça, en ronchonnant. Bref une famille plutôt "vivante" qui sait s'engueuler autour d'une partie de cartes, d'un couscous ou se moquer des envies de cinéma du petit blondinet.
Pour autant, au delà de la chronique familiale très réussie, "à l italienne" ( Etore Scola) la guerre se rapproche avec son lot d'attentats meurtriers à la bombe dans les cinémas, aux terrasses, d'assassinats de professeurs ( Smaïn), et de soldats qui patrouillent avec leur détecteur. Il faudra bientôt partir...
Un film juste, joyeux malgré tout, et, surtout très émouvant sur les dégâts humains d une période historique charnière.
Pour avoir côtoyé de nombreux pieds-noirs dans mes jeunes années à Perpignan, dans des milieux très différents, j'ai toujours retrouvé, au-delà d un débat politique encore très clivant en 2023, cette faconde unique, ces sourires méditerranéens, ce parler haut, et, très souvent, une grande fantaisie. Et dans les yeux de leurs parents, je n'y voyais pas le regret des terres perdues ( je n'en ai pas connu) mais souvent l amer souvenir ému d'un joyeux vivre ensemble qui n'existera plus.