Shōnen s’inspire d’un fait réel prenant place à la fin des années 60. Quinzième long-métrage d’Oshima, il met en scène les frasques d’une famille vagabonde, sillonnant le Japon tout en commettant des délits. Contrairement à ce qu’indique le titre, le film se concentre moins sur les déboires du garçonnet que sur les activités qu’il est contraint de commettre pour survivre aux côtés de sa famille.

Le récit commence lorsque sous ses yeux, sa mère provoque un atariya, phénomène de l’époque consistant à passer délibérément sous les roues d’une voiture afin d’en punir le conducteur et d’en tirer de l’argent. Ce ne sera que le premier d’une longue série d’escroqueries dont il sera désormais le principal acteur contre son gré. Le plan déclencheur demeure réellement celui où Toshio, le garçon, et son petit frère (qui seront rarement nommés, pas moins que les autres membres de la famille, non seulement afin de jouer sur le mystère de leur identité, mais en plus pour être plus universel dans l’étude de caractères) sont portés par un cargo, sur lequel on nous les montre bloqués entre un drapeau et une pile de canots de sauvetage.


Le Petit Garçon film qui livre une réflexion très sérieuse sur le thème de l’exploitation des enfants. La famille ne serait qu’alibi à l’excuser. Parallèlement, c’est le témoignage vivifiant d’un pays demeurant encore très refermé sur lui-même et dont la population nuit à sa propre réputation en vivant de la malhonnêteté. Ce cercle vicieux n’aurait pu être mieux reflété qu’au travers la figure familiale, exploitée au même titre que dans le film d’Imamura, comme un objet d’aliénation vers un devoir non-désiré, et au même titre que dans le film d’Ozu, un centre toxique à l’évolution individuelle à aspect sectaire. Le final glaçant du long-métrage confirme par ailleurs son application de la loi de Murphy, prévisible mais nécessaire étant donné le contexte de réalisation d’un tel long-métrage.


Vis-à-vis de l’aura de mystère intrinsèquement divulgué par l’ensemble du métrage, une séquence en particulier demeure viscéralement éclairante : entre deux nouvelles escroqueries, le jeune garçon observe les adultes qui l’entourent au travers d’une porte entrouverte. Chaque plan en décèle un ; ils boivent, chantent en tapant dans leurs mains… C’est par un cadre très restreint qu’il ne peut qu’anticiper la vie d’adulte stigmatisante qui l’attend. Rien d’autre ne semble transparaître.


Ainsi, la mise en avant de la figure familiale dans le cinéma japonais des années 1960 fait preuve de modernité et d’humanité. Effectivement, nous avions pu voir que le sujet était abordé sous un angle social, dans la mesure où dans les trois cas, la recherche de profits (Mon 2e frère, Le Petit Garçon) est abordée, se conciliant parfois à un rejet excessif de la consommation (Bonjour). Pour autant, le corpus se heurte à des questionnements plus politiques, notamment, au sujet des conditions précaires dans lesquelles vit la classe ouvrière, ainsi que plus largement, la population la moins aisée mise à l’honneur. C’est donc à partir de la mise en avant des « gens du peu » que le trio Ozu/Imamura/Oshima soulève des problématiques à l’époque sous-estimées, ayant eu un impact considérable sur des productions plus récentes. Nous pouvons à présenter nous interroger sur la manière dont des productions postérieures telles que Le Tombeau des lucioles, L’Été de Kikujiro, Tel père tel fils, Tokyo Sonata, ou encore Une affaire de famille, réalisés par d’autres pointures du pays, témoignent de la figure familiale.

Angeldelinfierno
8

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le 29 déc. 2023

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